Lieu, Kargo Kulte.
Interlocuteur, Gravotech.
Pascal Cros, CEO Gravotech.
Christine Morel, DRH Gravotech.
Fabrice liut, Designer systémique, Comptoir.
Fanny Parise, Anthropologue, Comptoir.
Marie-Cécile Godwin Paccard, Designer systémique, Comptoir.
Hugo Stépanian, Marque/com/prospective, Comptoir.
Meven Royo, Designer, Comptoir apprentissage.
Durée 1h. Accueil et fermeture 30min.
Premiers échanges sous forme de dialectique socratique.
En philosophie, la dialectique est un mode de raisonnement, de questionnement et d'interprétation qui consiste à analyser la réalité en confrontant des opinions, des idées, des thèses, en apparence contradictoires, et à chercher à les dépasser. Elle s'appuie sur ces contradictions pour montrer qu'elles sont en fait reliées par des relations de complémentarité, d'interdépendance ou d'identité et tente de faire émerger de nouvelles propositions (ou thèses) qui permettent de résoudre ou d'expliciter les contradictions initiales.
Le principe consiste en un échange Q/R en partant du sujet central organisation qui devient le projet commun du Comptoir. Au fil des rebonds de discussion entre les différents points de vue présents, le coeur de sujet évolue suivant les préoccupations.
L'indice orientant les échanges repose sur les hypothèses détectées par manque de réponses aux questions : recherche de dépassement des contradictions. C'est alors une question centrale qui devient le coeur de la suite des échanges, et ainsi de suite.
Entreprise mondiale de gravure, 3 secteurs principaux.
C'est une entreprise historique originaire des Etat-Unis avec un storytelling fort venant d'une explosion d'activité pendant la guerre.
++ L'entreprise est internationale, la proximité avec les clients est un avantage.
Les négociations commerciales se font nationalement et souvent encore au porte à porte.
++ "Le logiciel sublime la machine" Gravotech développe ses propres logiciels et les proposent même à la concurrence. C'est le software qui met en avant le hardware.
L'entreprise a été capable de s'adapter aux évolutions sociétales, notamment dans le secteur du luxe (la machine n'est plus dans l'arrière boutique mais participe à l'expérience de personnalisation des marques).
Cette évolution met en exergue la tension permamente de cette entreprise : elle est invisible pour le client final, mais elle est partout!
Elle est accompagnée par des fonds d'investissements et engagée dans une fusion qui n'est pas encore totalement terminée notamment d'un point de vue culturel.
Cependant, du point de vue de la direction, il y a une nouvelle histoire à porter depuis 2 ans qui n'est pas encore applicable. Les actions sont en cours depuis avril 2018.
Pour commencer, la stratégie est écrite par la top direction et decendante.
Le Comex est constitué de 8 personnes dont 6 nouvelles depuis le changement de direction.
Fanny complément d'hypothèses.
Passer d'un système paternaliste vers un nouveau système risque d'engendrer des modifications managériales et d'organisation qui doivent être pensées de manière globale ; au risque de destabiliser l'équilibre et la confiance des salariés.
La vision du nouveau DG nécessite d'être mise en pratique par des actions claires et simples. Plus loin, elle doit être confrontée et construite au regard des autres niveaux hiérarchiques de l'entreprise.
Le manque de feedback et d'échanges entre les différents niveaux hiérarchiques de l'entreprise sous entend la possibilité d'avoir énormément de pratiques informelles au quotidien et de la réticence possible aux changements de management.
++ Depuis 3 éditions est organisée une rencontre entre les directeurs et patrons qui se découvrent en physique pendant 2 jours pour échanger sur l'organisation.
++ Il y a une réelle volonté de faire sentir à tous les collaborateurs de tous les niveaux qu'ils font partie d'un même bateau et que tout le monde est moteur.
++ La top direction porte un réel "why" et vision pour l'organisation = permettre l'expression, exprimer l'identité.
++ Réelle volonté de créer la discussion et favoriser la communication entre le top et le down de l'organisation.
Un long passé d'organisation pyramidale et de culture paternaliste. Point positif : un patron qui a une vision claire et en raccord avec les enjeux actuels. Des changements déjà entrepris avec des actions concrètes au niveau du top management (séminaires des leaders).
Enjeux actuels : faire s'exprimer le bas de la pyramide. Recréer du lien avec le haut, instaurer de la confiance >>> transformation qui passe par le digital, la communication interne + des actions d'intelligence collective / facilitation.
= road map des actions avec une stratégie de déploiement de ces dernières > stratégie de montée progressive brique par brique par exemple.
Note perso : fait énormément penser au cas français de FAVI du temps de son ancien dirigeant visionnaire (à voir pour ceux qui connaissent pas)
1/ La notion de donner non seulement la parole, mais aussi l'espace. L'enjeu principal de la libération d'une entreprise et de l'encapacitation de toutes les personnes qui en font partie, c'est comment vous allez choisir de structurer les flux d'information. Comment les personnes vont se sentir à l'aise et en capacité de faire remonter ce qui les touche et ce qui les anime pour non seulement informer les strates supérieures, mais aussi imprégner leurs réflexions ?
Il y aurait un travail intéressant à faire sur la confiance. À l'instar de Meven, j'irais puiser de l'inspiration dans Reinventing Organizations, notamment le chapitre "decision making".
2/ Faire en sorte que tout le monde porte l'entreprise. Nous sommes dans des problématiques liées : l'encapacitation, la légitimité de chacun et chacune, la confiance, la circulation de l'information et du pouvoir dans l'entreprise, ne serait-ce que dans le ressenti. Je trouve que c'est un bel objectif meta à poser pour soutenir nos futures réflexions, un objectif qui peut servir de base intéressante pour en parler à tous les niveaux de l'entreprise car il est exprimé simplement et se comprend très bien, n'emploie pas de terminologie clivante ni de concepts détachés de la réalité.
Je garde des réserves quant à la stratégie numérique en tant qu'unique vecteur de changement. Je suis une grande convaincue que l'écueil "confondre la fin et les moyens" a fait échouer plus d'une transformation culturelle en entreprise quand elle a été forcée par le numérique. Nous touchons à un business physique, de précision, d'objet sublimé, je crois que cette notion de "craft" et d'artisanat doit être valorisée et que nous devons bien garder en tête que c'est une porte d'entrée idéale pour entrer en dialogue de confiance avec les opératrices et opérateurs qui connaissent le métier et les machines sur le bout des doigts et leur donnent naissance chaque jour.
La solution que j'entreverrais serait plutôt un dispositif global élaboré en fonction de l'objectif meta "faire en sorte que tout le monde porte l'entreprise", déclinée ensuite en grands pôles thématiques avec des sous-objectifs concrets qui ne s'arrêtent pas sur "le numérique" mais prennent en compte la réalité de chaque collaboratrice / collaborateur Gravotech en s'y adaptant a minima.
Pour y arriver, je débuterais par une observation anthropologique orientée vers les usages de dialogue / communication et les us et coutumes de l'entreprise (#Fanny). Je les modéliserais pour faire remonter au top management une image claire de l'état culturel de l'entreprise (comment chacun-e communique, comment l'information circule, sous quelle forme, avec quels débouchés, où sont les écueils ou les goulots d'étranglement, où sont les décalages culturels qui génèrent de la frustration, quels feedbacks sont bons et pour qui.)(#Fanny #MC #Fabrice). J'élaborerais ensuite sous forme de workshop avec une partie du top management une stratégie de communication interne qui explicite l'objectif meta (faire en sorte que tout le monde porte l'entreprise) et offre l'espace à chacune et chacun de contribuer. J'ouvrirais sur des modalités telles que le forum, le chaos créatif, le storytelling… au cours d'une grande campagne de réinvention collective de Gravotech (#Hugo). Je n'irais pas trop loin dans la formalisation pour commencer, afin de laisser le maximum d'espace aux différentes strates de vraiment expérimenter la créativité et la contribution, dans leurs modalités préférées. Le tout serait ensuite redigéré au cours d'allers-retours itératifs.
Selon moi, le prochain workshop avec la direction et les patrons et actionnaires serait l'opportunité idéale pour un "kickoff", une réelle déclaration d'un nouveau départ pour Gravotech.
Dans toute culture, il y a besoin de "ritualiser" les changements pour être clair en terme d'intention et d'énergie.
La vision de la top direction est existante et très pertinente et réfléchie. Cependant, elle n'est pas encore clairement exprimée, ce qui rend impossible un partage et une appropriation globale. De plus, elle est écrite seulement par quelques personnes et n'est pas révisée par tous mais "diffusée", ce qui est clairement un comportement Top-down qui peut poser problème pour la suite.
En effet, les techniques "d'empowerment" ne fonctionnent plus dans notre culture de société actuelle.
Il y a un besoin fort d'écrire le sens clairement et d'inviter sincèrement tous les collaborateurs à le réviser, donner leur avis, etc…
Pour ce faire, l'un des points principal serait déjà de briser la chaîne de la peur et les ruptures hiérarchiques encore présentes dans l'organisation.
Encore sur la logique de rituel, déclarer à tous que l'époque Gravotech d'avant est révolue, et que dès aujourd'hui, la peur, la colère et les engueulades ne sont plus au programme. Cette déclaration doit s'accompagner d'une réelle mise en pratique de la part de la hiérarchie, qui bascule alors petit à petit d'une posture de management paternel à une posture de management facilitateur.
Note de MC : l'engueulade n'est un mauvais moyen de communication que si elle est utilisée à mauvais escient :) parfois, il est nécessaire voire intéressant de laisser les frictions émerger, c'est même signe de bonne santé communicationnelle ;)
Une entreprise qui dispose de nombreux points forts : historicité, adhésion des salariés, storytelling fort, présence internationale, adaptation du business model aux évolutions sociétales ; mais qui demeure dans une dynamique autoritaire, paternaliste et pyramidale.
Les changements amorcés par le nouveau DG sonne l'heure d'une nouvelle ère pour l'entreprise : remaniement du comex, licenciement des salariés placardisés, mise en place d'un management transversal, etc.
La vision amorcée par le DG et les initiatives de la DRH s'inscrivent dans une dynamique positive de changement. Or, ces changements n'ont pas été construit avec les salariés et risquent d'être perçus comme une imposition potentielle.
Cette volonté de changement, aussi pertinente et réfléchie soit-elle, manque encore de clarté avant d'être déployée de manière efficace. Une meilleure connaissance de la réalité "terain" des différents acteurs (production, vendeur, etc) semble nécessaire afin d'identifier l'écart entre ce que pense la direction et ce qui se passe réellement sur le terrain. L'objectif n'est pas de faire le gendarme, mais de trouver des stratégies afin de rendre "assimilable" par les employés cette nouvelle vision de l'entreprise.
Attention à ne pas, sans le vouloir basculer à nouveau dans un système paternaliste : imposition de bonnes pratiques, mise place de nouveaux outils pour les salariés, nettoyage des effectifs, etc.
Pour ce fait, je préconise:
Une entreprise avec de l'ancienneté et une présence internationale. Son histoire est forte et chargée : fusion, rassemblement d'entreprises ayant des cultures et des philosophies du travail très différentes (finesse versus "buldozzer"). Par le passé un management paternaliste au "sang chaud" avec deux fortes personnalités, des frictions, des embalements. Ce management subsiste chez certains managers et cela diffuse encore une forme de peur au sein des équipes et un sentiment d'injustice. Des grands changements ont commencé à la tête de l'entreprise notamment dans le top management (remplacement d'une partie du COMEX).
Gravotech a le sens du service, une forte proximité avec ses clients et une véritable recherche de la satisfaction ("faire plaisir aux clients"). Les collaborateurs ont le goût du travail bien fait. L'ADN de l'entreprise est composé d'expertise et de technicité. La raison d'être de Gravotech est de permettre l'expression scripturale des objets : les technologies Gravotech permettent aux objets, aux composants, aux bijoux, aux technologies de prendre la parole.
Aujourd'hui, une grande partie du business est encore faites via le porte à porte. La volonté de Gravotech est de se positionner de plus en plus sur des grands comptes. Au départ, vendeur de machine, aujourd'hui Gravotech est une entreprise proposant des solution globales de gravure notamment avec son logiciel qui "sublime la machine".
Le lancement des leadership meeting a pour but d'insuffler la nouvelle stratégie de l'entreprise aux différentes directions.
Dans la même perspective, le projet de munir tous les collaborateurs opérationnels d'une adresse email est un moyen de pouvoir écouter et faire remonter des feedbacks pour s'assurer de la transformation interne.
L'arrivée de Christine va permettre de strucuter les ressources humaines, de transformer le management, de remodeler la culture d'entreprise et de créer un système de communication interne performant.
Problématiques :
Proposer un système d'interventions sous forme d'acupuncture : déclencher les interventions en suivant les priorités détectées et une logique systémique.
Les feedbacks durant les interventions seront à intégrer en continu pour tenir la bonne direction et doser les changements. C'est un "pas à pas systémique".
== Analogie avec la permaculture et l'acupuncture pour imager le modèle d'interventions que je propose.==
La proposition globale et alignée des experts au Comptoir.
Suite à tous ces retours et points de vue des différentes expertises et sensibilités, voilà la convergence et les recommandations des prochains pas, suivant une approche systémique & régénérative.
La phase 1 est claire et concrète : il faut connaître et comprendre l'organisation dans sa totalité pour agir en conséquence et écrire une histoire en commun plutôt qu'une stratégie (dificilement applicable dans un monde en perpétuel changement…)
Tous les collaborateurs doivent se sentir invités et nécessaires pour faire corps avec l'organisation.
L'analogie de l'acupuncture est adaptée ainsi que celle d'une remontée, d'information et de culture, du bas par capilarité, le long de la hiérarchie pour que les réflexions & la confiance imprègnent l'organisation de manière homogène.
La phase 2 est plus chargée d'hypothèses : en effet, sans conscience précise de l'organisation cela ne peut être que des "points de vue experts" déconnectés de la réalité de Gravotech, des bonnes pratiques reposant certes sur nos expériences, mais de l'ordre du théorique par rapport à la réalité Gravotech.
Lançons alors la phase 1 avant de co-construire la phase 2. Chaque lancement se fait en co-construction avec les responsables Gravotech, pas à pas, avec au coeur, toujours, l'intérêt du projet Gravotech et en toute transparence.
Retours de la part des décideurs de Gravotech sur la proposition de "système" à mettre en place faite par la première team du Comptoir.
Je vous invite ici à nous faire vos retours.
Christophe Dumais
Document très intéressant pour comprendre la démarche.
Je trouve la démarche très chouette.
Je m'abstiends de faire des retours sur le fond car je n'y ai pas assisté et ne fait pas partie de l'équipe.
Ceci étant c'est en résonnance avec ce que l'on souhaite faire à Archipel Kyosei.
J'ai l'impression que ce sont des démarches similaires faites en parallèle.
Est ce que l'objectif est de tester les choses avec une équipe qui se connait déjà pour ensuite l'ouvrir ?
Est ce que l'idée c'est d'avancer en parralèle et de prendre de chaque côté pour mieux avancer chacun ?
Comment se positionne Le Comptoir vis à vis d'Archipel Kyosei ?
Quels retours attendez vous de nous ?
Où en êtes vous vis à vis de Gravotech ? Quels sont les retours de cette proposition ? Qu'est ce qui a été accepté et réfusé et pourquoi ? Combien sont-ils prêts à mettre sur la table ? Combien de temps avez proposé et combien a été retenu ?
Bref, cela mériterait une discussion. :)
En attente d'accord avec le responsable Gravotech.
comptoir