--- tags: Première, Concurrence, marché, concurrence pure et parfaite --- # Chapitre 1 : Qu'est-ce qu'un marché concurrentiel et comment fonctionne-t-il ? [ToC] Consulter ce cours dans sa version en ligne et mise à jour : ![](https://api.qrserver.com/v1/create-qr-code/?size=75x75&data=https://hackmd.io/@sespad/HyZUtq4MY) ## Objectifs du chapitre * Savoir que le marché est une institution et savoir distinguer les marchés selon leur degré de concurrence (de la concurrence parfaite au monopole). * Savoir interpréter des courbes d’offre et de demande ainsi que leurs pentes, et comprendre comment leur confrontation détermine l’équilibre sur un marché de type concurrentiel où les agents sont preneurs de prix. * Savoir illustrer et interpréter les déplacements des courbes et sur les courbes, par différents exemples chiffrés, notamment celui de la mise en œuvre d’une taxe forfaitaire. * Savoir déduire la courbe d’offre de la maximisation du profit par le producteur et comprendre qu’en situation de coût marginal croissant, le producteur produit la quantité qui permet d’égaliser le coût marginal et le prix ; savoir l’illustrer par des exemples. * Comprendre les notions de surplus du producteur et du consommateur. ## Qu'est-ce qu'un marché ? ### Définir la notion de marché Chaque jour, nous sommes amenés à acheter et vendre des biens et services. **Le marché est le lieu de rencontre des offreurs et de demandeurs**, pour les économistes il permet donc de coordonner les échanges marchands. Lorsqu’un demandeur a besoin d’un bien (ou d’un service) il va émettre une demande sur le marché, où un offreur sera en mesure de répondre ou non à cette demande. Le marché est un « lieu » d’échange qui n’est pas exclusivement physique, c’est une construction intellectuelle des économistes pour rendre compte plus facilement des échanges. Le terme « marché » désigne initialement le lieu où se rencontrent les offreurs et demandeurs, avec l’image du marché aux fruits et légumes sur la place du village. De cette acception ancienne du mot « marché », les économistes ont développé une conception plus abstraite pour admettre un cas plus général. Le marché est non seulement le lieu de rencontre des offreurs et de demandeurs mais aussi un lieu qui crée et subit des règles (légales ou non) qui lui sont propres. Tous les marchés sont différents et ont une structure différente, des règles différentes, des acteurs différents, etc. Par exemple, le marché de l’immobilier Parisien n’est pas le même que celui d’Aurillac, les règles et le degré de concurrence ne sont pas les mêmes. --- #### Document 1 : Le marché >Le marché est parfois présenté comme la « loi de la jungle », comme un état de nature qui se mettrait en place spontanément si les obstacles à son fonctionnement étaient retirés. Cette vision des choses ignore l’histoire. Le marché s’est construit progressivement, lentement, par une modification des comportements, des mentalités, des institutions. Étudiant l’économie européenne du xve au xviiie siècle, l’historien Fernand Braudel[1985] distingue plusieurs niveaux d’organisation de la vie économique. Une partie importante de la population européenne vit pour l’essentiel d’autoconsommation. Production et consommation se font donc sans échange. L’économie de marché représente un stade plus élaboré, marqué par la disjonction entre production et consommation, le rôle de la monnaie et de la finance, la mise en relation par le système des prix de marchés élémentaires séparés dans l’espace. Enfin, Braudel pose une distinction fondamentale entre économie de marché et capitalisme. Celui-ci se développe et prospère avec la bienveillance et souvent la complicité de l’État, permettant d’échapper à la concurrence et d’accumuler des rentes. Le financement des guerres et le commerce « au loin », épices et soieries contre métallurgie et cotonnades, sont les domaines d’élection de ce capitalisme reposant sur l’opacité des échanges et la mobilisation d’importants capitaux, ce qui limite la concurrence. Cette description fine nous met sur la piste d’une idée essentielle : il n’existe pas un, mais des marchés, fonctionnant très différemment selon les institutions qui les encadrent. Parienty, Arnaud. « II. Le fonctionnement des marchés », Arnaud Parienty éd., _Précis d’économie._ _Préparation aux épreuves d’économie des concours._ La Découverte, 2017, pp. 27-51. --- ### Le marché parfait et la concurrence pure et parfaite Qu’est-ce que la concurrence ? Nous pouvons définir la notion de concurrence de deux manières distinctes : 1. La concurrence est un état sur un marché. C’est le fait que les agents économiques respectent les conditions de la concurrence pure et parfaite. Pour faire simple, cela veut dire qu’aucun agent n’a de pouvoir de marché, c’est-à-dire, la capacité à distordre celui-ci, principalement en influençant les prix 2. La concurrence est comportement de rivalité entre les agents, ils s’opposent dans une compétition économique. La concurrence est donc un terme polysémique, elle a plusieurs sens. Il faut bien différencier les deux pour comprendre toutes les implications dans les textes. Notre définition de marché concurrentiel sera la première, un état du marché. --- #### Document 2 : La concurrence pure et parfaite > Le modèle de concurrence pure et parfaite propose une représentation simpifiée d'une écoonmie où la concurrence s''exerce uniquement par les prix. Aucun agent ne peut jouer sur d''autres facteurs que le prix pour s''imposer (taille sur le marché, différence de qualité du produit, accès à une ressource privilégiée, etc). Ce modèle permet donc de représenter ce qu se passerait dans le "cas limite" où la concurrence sexercerait uniquement *via* les prix auxquels les agents sont disposés à acheter ou vendre des biens en tout point identiques. Il permet de prédire comment les prix devraient s'adapter aux variations des quantités offertes ou demandées. E. Buisson-Fenet et M. Navarro, *La microéconomie en pratique*, Armand Colin coll '"Cursus'", 2018. | Condition | Explication | |:------------------------:|:--------------------------------------------------------------------:| | Atomicité | Grand nombre d''offreurs et de demandeurs | | Fluidité | Libre entrée et sortie du marché pour les agents | | Homogénéité des produits | Les produits échangés sur le marché sont tous strictement identiques | | Transparence | L''information est parfaite et gratuite | | Mobilité des facteurs de production | A tout instant, les travailleurs ou le capital peuvent être moblisés pour produire autre chose, sur un autre marché | --- Sur un marché en concurrence pure et parfaite, on dit que les agents sont _price-takers_, ils ne peuvent pas influer sur les prix., ceci grâce à la multiplicité des acheteurs et vendeurs (*atomicité*). En effet, le marché va agréger les quantités de biens offertes et demandées par les agents puis il va fixer un prix. En ressort un couple (quantité, prix) qui sera connu de tous et utilisés par tous. Nous pouvons représenter cela graphiquement de la manière suivante : --- #### Document 3 : Courbes d'offre et de demande ![Offre et demande](https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/6/6b/Offre-demande-equilibre.svg/1024px-Offre-demande-equilibre.svg.png) Source : https://upload.wikimedia.org/wikipedia/commons/thumb/6/6b/Offre-demande-equilibre.svg/1024px-Offre-demande-equilibre.svg.png --- Avec le modèle de la concurrence pure et parfaite, plus un bien est rare (moins il y a d’offreurs), plus son prix sera élevé. A l’inverse plus il est courant moins sont prix sera élevé. On dit alors que la **concurrence s’exerce uniquement par les prix.** On appelle **Loi de l’offre et de la demande** la relation qui lie offre/demande au prix. La loi de l’offre nous dit que l’offre est positive et croissante au fur et à mesure que le prix augmente alors que la loi de la demande formule l’inverse, la demande exprimée est positive et décroissante à mesure que le prix augmente. En effet si le prix de vente d’un bien augmente, les producteurs seront plus enclins à le produire alors que les acheteurs seront moins enclins à l’acheter. Le **prix d’équilibre** est le prix qui résulte d’une confrontation de l’offre et de la demande sur le marché. Dans le modèle de concurrence pure et parfaite, le prix d’équilibre est égal au prix de marché, le prix pratiqué par le marché, puisque les agents sont tous price-takers, ainsi le prix fixé par le marché est mécaniquement celui d’équilibre. --- #### Document 4 : L'exemple d'Uber > [Depuis 2009] En utilisant une application sur smartphone, Uber sert de plateforme pour mettre en relation les gens qui veulent se déplacer grâce aux conducteurs de véhicules enregistrés sur Uber. [...] Quand beaucoup de gens cherchent un véhicule - comme pendant une tempête de neige ou au nouvel an -, Uber ajuste les prix à la hausse, fixant un prix plus élevé jusqu''à ce que toutes les personnes qui veulent un véhicule au prix courant puissent en trouver un. Les augmentations de prix [sont conçues] de manière à laisser le moins de gens possible sans véhicule [...]. Comme Uber l''explique, '"nous ne possédons pas de véhicules, ni n''employons de conducteurs. Les prix élevés sont nécessaires de manière à avoir de véhicule disponibles pendant les heures de pointe'". Cette explication est confirmée par un conducteur Uber qui déclare, '"si je n''ai rien à faire et si je vois un pic des prix, alors je sors'". P. Krugman et R. Wells, *Macroéconomie*, édition De Boeck, 2016. --- Dans un marché concurrentiel, si le prix augmente alors les offreurs seront plus incités à augmenter les quantités offertes et les demandeurs, moins enclins à acheter. S’il y a plus d’offre que de demande, on parle d’un marché en **surplus**, s’il y a plus de demande que d’offre, on parle de marché en **pénurie**. Quand un de ces deux cas intervient sur un marché, d’autres marchés peuvent être impactés. Prenons l’exemple du café, si son prix venait à augmenter drastiquement par un manque d’offre, le prix d’équilibre serait alors plus élevé qu’avant pénurie, ce qui priverait tout une partie des demandeurs de sa consommation. Nous pouvons imaginer qu’en l’absence de café, les consommateurs iraient consommer du chocolat chaud ou du thé. On parle ici de **biens substituables**, ce ne sont pas les mêmes biens mais ils peuvent satisfaire le même besoin. ### Le gain à l'échange Le marché permet aux agents d’échanger des biens et services contre une rétribution financière. Comme nous l’avons vu auparavant, le marché agrège les offres et les demandes pour donner un prix d’équilibre. Les agents sont price-takers, ils achètent et vendent au prix de marché, qui est à long terme égal au prix d’équilibre. Or, les agents ont-ils intérêt à échanger à ce prix d’équilibre ? On dit que les demandeurs ont une disposition à payer, c’est le montant qu’ils sont prêt à payer pour un bien ou un service. Par exemple si je suis prêt à payer 600€ un nouveau smartphone, ma disposition à payer (un smartphone) est de 600€. Si le prix de marché des smartphones est de 500€, alors il y a une différence positive de 100€ entre ma disposition à payer et le prix d’achat, je viens de réaliser un surplus individuel du consommateur de ce même montant. Le marché compte une multitude d’agents et sur toute la courbe de demande, il y a des agents qui ont une disposition à payer plus élevée que le prix de marché/équilibre, tous ces agents vont donc réaliser un surplus individuel du consommateur. En additionnant ces surplus, on arrive au surplus (total) du consommateur. C’est en quelque sorte le montant que les consommateurs, dans leur ensemble, étaient prêt à payer et qu’ils n’ont pas eu besoin de payer en plus, c’est de l’argent non dépensé. --- #### Document 5 : Surplus individuel sur un marché | Acheteur potentiel | Disposition à payer | Prix payé | Surplus individuel | |:---------------------- |:-------------------:|:---------:|:------------------:| | Sophie | 59 | 30 | 29 | | Paul | 45 | 30 | 15 | | Claudia | 35 | 30 | 5 | | David | 25 | | | | Nathalie | 10 | | | | Ensemble des acheteurs | | | **49** | --- (Nb : Les agents qui ont une disposition à payer inférieure au prix de marché n’achètent pas le bien/service et donc ne participent pas au marché. Ils n’ont donc pas de surplus) Les offreurs ont aussi un surplus, qui dépend de leurs coûts. Si mon entreprise de boulons permet de produire un boulon pour 2€, en payant couts fixes et couts variables, alors je vais réaliser un bénéfice si je vends mes boulons pour plus de 2€ unité. Donnons un prix de marché à 2€20, alors je vais réaliser un bénéfice de 20centimes par boulon. C’est mon surplus individuel du producteur, la différence entre le prix de marché et le prix auquel j’étais prêt à vendre ma production. La logique est la même que celle du consommateur mais inversée. On peut représenter les deux surplus sur une graphique d’offre et de demande : --- #### Document 6 : Représentation graphique du surplus ![](https://i.ibb.co/fY3XLWp/9aXXWL.png) --- On appelle **surplus total** le surplus du producteur additionné au surplus du consommateur. Il représente les **gains à l’échange** du marché et montre que le marché permet aux agents de générer un gain en échangeant sur celui-ci. Le surplus est également distribué dans cet exemple mais ce n’est pas forcément le cas, cela dépend du degré de concurrence du marché, ce que nous verrons au chapitre suivant. Il dépend aussi de la forme des courbes. Le surplus peut se calculer, il revient à faire un calcul d’aire des triangles coloriés sur le graphique. On a ainsi deux formules : $$ \text{Surplus du consommateur} = (\frac{\text{Disposition à payer} - \text{Prix de marché}) * \text{Quantité d’équilibre}} 2 ) $$ $$ \text{Surplus du producteur} = (\frac{\text{Prix de marché} - \text{Cout de production})* \text{Quantité d’équilibre}} 2 ) $$ Calculons les deux surplus : $$ Sc = ((50 000 – 30 000) * 40 000 )/2 = 40000 $$ $$ Sp = (30 000 – 10 000)* 40 000) /2 = 40000 $$ Ici les surplus sont égaux, ce qui était visible graphiquement. Le surplus total est donc de *800 000 €* ### La détermination de l'offre : entre cout marginal et prix de vente Les offreurs produisent des biens pour les vendre contre un prix, fixé par l''équilibre du marché. Les entreprises ont tout interet à produire jusqu'à la dernière unité rentable, cest à dire jusquà la dernière unité qui ne réduit pas le profit de l''entreprise. C'est ce que nous allons voir dans l'exercice qui suit, mais avant, quelques définitions quant aux couts de l'entreprise. #### Typologie des coûts ##### Les coûts fixes Les coûts fixes sont les coûts qui sont indépendants du nombre de produits. Ce sont les coûts de structure par exemple, comme les locaux. Quelque soit la quantité produite, il nous faudra une usine. ##### Les coûts variables Les coûts variables sont dépendants du nombre d''unités produites, ce sont les coûts liés aux matières premières par exemple. Plus les quantités augmentent, plus les coûts variables augmentent. ##### Le coût moyen $$ CM = \frac {CT} {Qte} $$ ##### Le coût marginal $$ Cm_{(n)} = CT_{(n)} - CT_{(n-1)} $$ #### Exercice d''application $$ \text{Profit} = (\text{Prix unitaire} - \text{Cout de fabrication unitaire}) * \text{Quantité vendue} $$ Considérons l'entreprise suivante : > Basket'ball est une entreprise qui produit des ballons de basket. L'usine de production a couté 100€ et permet de produire jusqu'à 10 ballons. Les coûts de l'entreprise sont représentés dans le tableau suivant : | Unités | Cout fixe | Cout variable | Cout total | |:------:|:---------:|:-------------:|:----------:| | 1 | 100 | 3 | | | 2 | 100 | 6 | | | 3 | 100 | 13 | | | 4 | 100 | 23 | | | 5 | 100 | 36 | | | 6 | 100 | 53 | | | 7 | 100 | 74 | | | 8 | 100 | 99 | | | 9 | 100 | 127 | | | 10 | 100 | 160 | | Lecture : Si l'entreprise produit 6 unités, ces 6 unités lui couterons 153 €, avec 100€ de cout fixe et 53€ de couts variable. Compléter le tableau suivant : | Unités | Cout fixe | Cout variable | Cout total | Cout moyen | Cout marginal | Profit |:------:|:---------:|:-------------:|:----------:| :--: |:----:| :--:| | 1 | 100 | 3 | 103 | 103||- | 2 | 100 | 6 | 106 | 53|3|- | 3 | 100 | 13 | 113 | 37,6| 7 | 4 | 100 | 23 | 123 | 30,75 | 10| | 5 | 100 | 36 | 136 | 27|13| | 6 | 100 | 53 | 153 | || | 7 | 100 | 74 | 174 | || | 8 | 100 | 99 | 199 | || | 9 | 100 | 127 | 227 | || | 10 | 100 | 160 | 260 | || Question : 1. Si le prix du marché est fixé à 25€, combien l'entreprise produira-t-elle de ballons pour maximiser son profit ? ## Exercices de préparation au contrôle ### 1. Monter que le marché est une institution. >Le marché est une lieu fictif ou réel de rencontre de l'offre et de la demande. Il permet de coordonner l'offre et le demande, et ainsi permet d'organiser la production marchande. Les demandeurs désirant acheter des biens ou services se rendent sur un marché, au contact des offreurs proposant à la vente leur production. Une institution est une structure qui organise une partie de la société, avec des règles qui lui sont propre. Le marché, par son rôle de coordination de l'offre et de la demande, est une institution permettant à l'offre et la demande d'échanger la production machande. Il n'y aurait donc pas d'échange marchand sans marché. >Par exemple, le marché de l'immobilier met en relation des offreurs de logement avec des demandeurs de logement. Sans le marché, ces agents ne pourraient se rencontrer et leurs offres et demandent ne pourraient être coordonées. Qu'ai-je fais ? Première étape, je vais définir les termes importants de sujet. Ici ils permettent de répondre naturellement à la question. Je montre que les deux defs ont un point commun, l'une englobe l'autre. Et je donne un exemple. ### 2. Quel est l'effet d'une taxe sur le marché ?