# Top des fausses idées reçues sur Bitcoin et les cryptomonnaies
Ecrit le 23 mai 2021 (W.I.P., dernière mise à jour le 26 mai 2021)
Auteur : [Renaud Lifchitz](https://www.linkedin.com/in/renaudlifchitz/), passionné de blockchains depuis 2010
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*Le vrai fléau de nos sociétés à l'heure actuelle ce sont les pseudos-experts qui lâchent leurs certitudes après s'être arrêtés à quelques titres de presse populaires aguicheurs et tape-à-l'oeil. Moins les gens connaissent un sujet et plus ils s'expriment publiquement dessus (https://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_Dunning-Kruger), une vraie plaie, comme en témoignent par exemple les avis de non-scientifiques ou peoples sur le COVID19, largement relayés par la presse et les réseaux sociaux...*
*Aujourd'hui on entend à peu près tout et n'importe quoi sur Bitcoin et les cryptomonnaies : crime, pollution, absence d'usage, et ce, en contradiction avec tous les chiffres et études qui existent... Comment les reconnaître ? C'est simple, toujours par absence criante d'arguments, de chiffres et d'études sérieuses citées, TOUJOURS...*
Ici, tout est documenté, de sources sérieuses et étayées, voires mêmes officielles ou d'agences gouvernementales :face_with_hand_over_mouth:. Pourquoi n'en entend-t-on pas plus parler ? Simplement peut-être parce que c'est moins sexy que les pseudos "scandales" blockchain lancés régulièrement dans la presse...
## Bitcoin = blockchain ?
D'après tous les médias, la blockchain c'est Bitcoin ! C'est évidemment tout à fait faux :
1. Il y a des [milliers de blockchains et cryptomonnaies](https://coinmarketcap.com/), publiques, privées ou de consortium. Il est totalement biaisé et illusoire de faire de Bitcoin un exemple alors que sur de nombreux points (technologie de minage, absence de smart contracts, absence de blockchain privée, relative absence d'applications d'entreprise) il fait figure d'exception dans cet écosystème. C'est une technologie intéressante mais c'est aussi la plus vieille et probablement la moins représentative des blockchains actuelles et de leurs usages (par exemple la finance décentralisée ne se fait nullement sur Bitcoin !).
2. Contrairement aux idées reçues, les blockchains n'ont pas uniquement des usages monétaires : certains blockchains sont consacrées à l'[authentification et à la vie privée](https://www.nucypher.com/), d'autres au [stockage distribué](https://sia.tech/), au [calcul distribué](https://iex.ec/fr/), à la [gestion de noms de domaines](https://brave.com/unstoppable-domains/), à la délivrance d'[accès VPN sécurisés](https://www.orchid.com/). Elles permettent aussi d'éviter d'accorder sa confiance à d'uniques gros acteurs comme les GAFAs. Il faut donc définitivement arrêter l'éternelle confusion "blockchain = argent".
## Pollution ?
Bitcoin et les cryptomonnaies pollueraient énormément ? 8 arguments qui montrent que c'est en grande partie faux :
1. Quasiment tout ceux qui disent ça dans leurs **discours confondent consommation et pollution**, et le fossé entre les deux est... phénoménal.
### Concernant la consommation
2. La recherche de rentabilité pousse les mineurs à utiliser l'énergie en surplus, qui n'est généralement pas vendue (perdue) ou bradée. L'énergie n'étant majoritairement pas stockable, les moyens de production d'électricité sont désactivés quand ils ne sont pas utilisés. Une grande partie des capacités de production électrique existantes n'est donc pas utilisée, en particulier les énergies renouvelables qui fluctuent dans le temps (énergie solaire, éolienne, hydroélectrique). (cf. https://www.clubic.com/bitcoin/actualite-888164-gaspillage-centrale-electrique-energie-miner-bitcoin.html & https://blog.coinbase.com/fact-check-is-bitcoin-mining-environmentally-unfriendly-3559823af6f1)
3. L'essentiel de la production électrique est de toute façon perdue (près de 70% aux USA en 2019, cf. https://journal.bitcoinreserve.com/bitcoin-a-bold-american-future/), la consommation énergétique de Bitcoin est à côté très négligeable :
![Energy lost in the USA in 2019](https://pbs.twimg.com/media/Ew2tbuQXIAkH4CV?format=jpg&name=4096x4096)
4. La quasi-totalité des blockchains sorties et utilisées récemment fonctionnent à base de preuve d'enjeu ("Proof of Stake") où chaque noeud peut fonctionner sur un ordinateur de type Raspberry Pi (https://www.raspberrypi.org/products/raspberry-pi-4-model-b/) qui consomme typiquement 5W, soit moins qu'une ampoule électrique ! Une blockchain aussi grande que celle de Bitcoin avec cette technologie ne pollue pas plus qu'une ville d'environ 100 000 habitants comme La Rochelle... Tout de suite moins sexy pour les manchettes de journaux, hein ? (cf. https://en.cryptonomist.ch/2021/05/23/proof-of-stake-crypto-green-new-deal/
)
5. La dominance de Bitcoin par rapport à l'ensemble des blockchains est en baisse constante et est aujourd'hui proche de 40%, Bitcoin est donc en minorité dans l'usage financier global des blockchains : https://fr.tradingview.com/symbols/CRYPTOCAP-BTC.D/
### Concernant la pollution
6. 70% de l'énergie utilisée par les blockchains est non carbonnée et en bonne partie renouvelable donc quasiment non polluante. 20% de cette énergie est même entièrement renouvelable (cf. https://cryptonaute.fr/lutilisation-des-energies-renouvelables-dans-le-minage/ & https://www.clubic.com/antivirus-securite-informatique/cryptage-cryptographie/crypto-monnaie/actualite-15879-des-mineurs-ont-recours-aux-energies-renouvelables.html & https://cryptoast.fr/banques-polluent-plus-bitcoin-btc-etude/).
7. Bitcoin étant la plus vieille blockchain, c'est comme les plus vieux modèles de voiture, ce sont les plus consommateurs de carburant... S'attaquer aux voitures qui roulent au Super, alors que plus aucune voiture fabriquée actuellement n'en consomme, c'est se mettre volontairement le doigt dans l'oeil sur le futur de ces technologies. Aujourd'hui toutes les nouvelles blockchains sont sans aucun minage, donc Bitcoin fait figure d'exception et non d'exemple typique de blockchain ! L'Université de Cambridge (https://cbeci.org/faq/) conclue que "même si le mining de Bitcoin se faisait uniquement avec des centrales à charbon – un scénario très irréaliste […] - le total des émissions de CO2 ne dépasserait pas 58 millions de tonnes de CO2, soit 0,17 % des émissions mondiales."
8. Contrairement à l'industrie lourde, l'extraction de métaux (par exemple pour les batteries) ou l'industrie de la mode, l'industrie du minage est un des plus vertes, et ne rejette aucune matière chimique dans l'atmosphère ou dans l'eau, et ne pollue donc pas chimiquement l'air ou les nappes phréatiques (cf. https://www.zerohedge.com/crypto/bitcoin-energy-use-far-lower-banking-system-gold-industry-report)
## Activités illicites ?
Bitcoin et les cryptomonnaies serviraient essentiellement à des activités illicites ? (drogue, armes, dark net, ransomwares, ...) Sans doute l'idée la plus fausse ancrée dans les opinions :
1. S'il y a bien une chose qui fait consensus pour les organismes privés et publics, c'est que c'est largement exagéré et totalement faux.
- ++Europol++ (public) : "In 2019, the overwhelming majority of bitcoin transactions were linked to investment and trading activity so, despite considerable abuse, **criminal activity corresponds to only 1.1% of total transactions**" (cf. https://www.europol.europa.eu/activities-services/main-reports/internet-organised-crime-threat-assessment-iocta-2020 & https://www.europol.europa.eu/sites/default/files/documents/internet_organised_crime_threat_assessment_iocta_2020.pdf)
- ++Chainalysis++ (privé) : "**In 2020, the criminal share of all cryptocurrency activity fell to just 0.34%**" (cf. https://blog.chainalysis.com/reports/2021-crypto-crime-report-intro-ransomware-scams-darknet-markets)
- ++Michael J. Morrell, ancien directeur de la CIA++ (gouvernemental) : "Bitcoin use in illicit finance is significantly overstated." and "Blockchain is highly effective for crime fighting."
- ++Officiel à la CFTC++ ("Commodity Futures Trading Commission", gouvernemental) : "**It is easier for law enforcement to trace illicit activity using Bitcoin than it is to trace cross-border illegal activity using traditional banking transactions, and far easier than cash transactions.**"
- ++Sigal Mandelker, ex-officiel du Trésor Américain++ (gouvernemental) : "This view is shared by a number of people in this space who have experience working in law enforcement"
(cf. https://cryptoforinnovation.org/resources/Analysis_of_Bitcoin_in_Illicit_Finance.pdf)
2. L'analyse de l'activité criminelle sur presque 10 ans confirme que cela n'a jamais ni été prépondérant ni même important :
![Percentage of Illicit Activity using Bitcoin (2012-2020)](https://i.imgur.com/MazptBa.png)
3. Concernant les ransomwares, ils ont existé dès 2005, soit 4 ans avant toute existence de cryptomonnaie, et 10 ans avant leur démocratisation... En 2005 et 2006 sévissaient déjà de nombreux ransomwares : Gpcode, Archiveus, Krotten, Cryzip, Ransom, .... Les rançons étaient payables en dollars américains par e-gold, transferts Western Union, SMS surtaxés ou par achat et déblocage sur un site dédié. Rien de nouveau sous le soleil donc !
4. **Bref, les activités illicites en cryptomonnaies représentent 0,3% à 3% des volumes d'échanges selon les études, soit 10x moins que les monnaies fiducaires en pourcentage et 100 à 1000 moins en volume financier !** Il est donc urgent de s'occuper et d'éradiquer les véritables activités illicites facilitées, comme le montrent tous les chiffres, à 99,99% par... le cash ! :wink:
## Valeur basée sur rien ?
1. Comme pour la quasi-totalité des monnaies fiduciaires dans le monde (notamment l'Euro et le Dollar). Depuis les années 1970 il n'y a plus la moindre convertibilité vers l'or et l'émission de monnaie fiduciare est arbitraire ! :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Accords_de_Bretton_Woods#La_fin_du_syst%C3%A8me_mon%C3%A9taire_de_Bretton_Woods
2. Par ailleurs, pour relancer l'économie depuis la crise des subprimes de 2008 et du COVID19 en 2019, les USA comme l'Europe impriment des sommes fantastiques (aux USA, environ 200 milliards par mois ces derniers mois), qui ne correspondent à aucune activité commerciale ou économique. Comme les banques centrales (FED et BCE) n'ont pas le droit d'injecter de l'argent dans l'économie réelle (distribution aux entreprises ou aux foyers), elles l'injectent dans les banques commerciales, qui ne sont pas vraiment disposées à le garder car les taux d'intérêt sont nuls voire négatifs... Elles le dépensent donc dans un des rares marchés règlementés et peu risqué qu'est la bourse, d'où des marchés actions au plus haut historique malgré des crises historiques et une économie réelle totalement décorrélée. Ici, on peut parler d'une bulle boursière car elle est créé totalement artificiellement par simple impression de monnaie, sans relation avec les activités économiques des entreprises sous-jacentes.
3. L'inflation dans le monde réel commence à devenir préoccupante, et le dollar commence à ne plus valoir grand chose avec ses [4,16% d'inflation sur les 12 derniers mois](https://www.in2013dollars.com/us/inflation/2020?amount=1&future_pct=0.02) et sa perte de pouvoir d'achat par un facteur 25 en seulement 1 siècle :
![Percentage of Illicit Activity using Bitcoin (2012-2020)](https://www.visualcapitalist.com/wp-content/uploads/2021/03/Purchasing-Power-of-the-U.S.-Dollar-Over-Time.jpg)
(cf. https://www.visualcapitalist.com/purchasing-power-of-the-u-s-dollar-over-time/)
Il est alors tout à fait logique et sain que les entreprises qui ont de la trésorerie la protègent de cette fonte inéluctable en achetant des actifs déflationnistes comme Bitcoin, elles sont d'ailleurs [nombreuses aux USA à avoir franchi le pas](https://bitcointreasuries.org/).
## Achats avec Bitcoin ?
On ne pourrait rien acheter avec Bitcoin et les cryptomonnaies ? 3 arguments qui montrent que c'est faux :
1. De la même manière qu'on ne paie pas son boulanger en Paypal ou en virement bancaire, on ne le paie pas en cryptomonnaies. A chaque moyen de paiement son usage et environnement adéquat.
2. La plupart des achats en cryptomonnaies se font très classiquement avec des cartes bancaires, c'est le moyen le plus simple pour pouvoir dépenser ses cryptomonnaies, en ligne comme dans les boutiques physiques, sans se préocupper de l'acceptation directe de cryptomonnaies par le commerçant. De nombreux prestataires proposent des cartes bancaires Visa ou Mastercard, comme [Binance](https://www.binance.com/fr/cards) (15 millions de clients), [Crypto.com](https://crypto.com/cards) (10 millions), [Coinbase](https://card.coinbase.com/) (56 millions), ... **Il est donc tout à fait faux de dire qu'on ne peut pas acheter son pain en cryptomonnaies, ou que personne ne le fait.**
3. Ceux qui veulent proposer une expérience de paiement en cryptomonnaies plus pure et moins bancarisée à leur clientèle se tournent vers des prestataires de paiement en cryptomonnaies, exactement comme il en existe pour les paiements en carte bancaire, par exemple [BitPay](https://bitpay.com/business) ou [CoinPayments](https://www.coinpayments.net/). Il y a mille et une façon de dépenser ses cryptomonnaies nativement, une liste non exhaustive de commerçants qui acceptent le Bitcoin est par exemple disponible ici : https://bitcoin.fr/depenser-ses-bitcoins/ .
## Spéculation ?
Bitcoin et les cryptomonnaies ne serviraient qu'à la spéculation ? 6 arguments qui montrent que c'est faux :
### De la définition de la spéculation
1. De ce que j'ai pu lire partout, personne n'arrive à s'accorder sur les différences entre investissement et spéculation, donc inutile de s'écharper sur ces définitions, cela ne fait nullement avancer le débat.
2. Ceci dit, les plus fervents défenseurs de Bitcoin et des cryptomonnaies n'achètent et ne vendent pas tous les jours, ils conservent leurs avoirs sur de très longues années, ce qui a même donné les termes très usités de "HOLD" et "HODL", étant une véritable discipline des puristes. Ce sont donc les utilisateurs les moins spéculateurs, à contrario des financiers qui sont venus plus tard utiliser ces actifs pour du trading...
3. Concernant une définition fiscale de la spéculation, il est intéressant de noter que l'Allemagne, comme quelques autres pays, considèrent que détenir au moins 1 an des cryptomonnaies n'est pas de la spéculation, et n'est donc pas imposable, contrairement aux achats et ventes se faisant en moins de 12 mois.
### De la philosophie et du contexte de création
4. Bitcoin a été conçu par des cypherpunks et crypto-anarchistes justement ouvertement contre le système financier et capitaliste, dans le contexte de la crise des subprimes de 2008.
### Usages non spéculatifs largement installés
5. Il est essentiel de comprendre qu'un humain sur deux n'est pas bancarisé dans le monde, et que ce n'est pas vraiment le cas dans nos contrées occidentales en Europe ou aux Etats-Unis. Du coup nous avons une vision totalement faussée des usages monétaires dans les zones moins développées économiquement. L'usage des cryptomonnaies en Amérique du Sud, en Asie et en Afrique a littéralement explosé ces dernières années, pour diverses raisons :
- faible bancarisation
- faible valeur de la monnaie
- restrictions de change (en volume ou en devises)
- inflation galopante, par exemple dernièrement au Liban (https://www.lecommercedulevant.com/article/30257-en-pleine-crise-le-bitcoin-a-le-vent-en-poupe-au-liban)
Les témoignages sont très nombreux en [Amérique du Sud](https://www.daviescoin.io/blog/the-booming-interest-for-cryptocurrencies-in-latin-america), où les cryptomonnaies servent littéralement de gilet de sauvetage et de refuge face à des monnaies d'Etat qui dévissent de plusieurs milliers de pourcents par an, comme au [Vénézuela](https://bitcoin.fr/temoignage-bitcoin-au-venezuela/) où elles sont indispensables pour plusieurs dizaines de milliers d'habitants pour leur survie alimentaire (cf. par exemple ce témoignage poignant: https://www.nytimes.com/2019/02/23/opinion/sunday/venezuela-bitcoin-inflation-cryptocurrencies.html). Dans ces pays, 20 à 30% des transaction se font en cryptomonnaies, Bitcoin ou stablecoins dollar (DAI et USDC). Même des entreprises comme les [compagnies aériennes](https://finance.yahoo.com/news/venezuela-caracas-air-adds-bitcoin-120500894.html) acceptent les cryptomonnaies.
![How Common is Crypto?](https://cdn.statcdn.com/Infographic/images/normal/18345.jpeg)
(cf. https://www.statista.com/chart/18345/crypto-currency-adoption/)
6. Aujourd'hui une énorme partie de la finance décentralisée ("DeFi") repose sur l'usage de stablecoins (et non de Bitcoin !) : des cryptomonnaies au cours stable par rapport aux monnaies fiduciaires (essentiellement par rapport au dollar américain). Le site [Defi Pulse](https://defipulse.com/) recense en temps réel et en toute transparence les applications les plus utilisées en volume monétaire et ce sera sans doute une surprise pour certains, mais le top 3 sont des applications de prêt ("lending") et d'emprunt de stablecoins et non des applications d'achat, vente ou de spéculation de cryptomonnaies, n'en déplaise à certains... **Difficile ensuite d'affirmer que l'essentiel des usages est spéculatif avec du capital en stablecoins bloqué contre des intérêts comme sur votre livret A**... Ces applications d'épargne rémunérées se développent d'ailleurs énormément pour le grand public : [YouHodler](https://fr.youhodler.com/), [Yield](https://www.yield.app/fr) , [Celsius](https://celsius.network/), ...
## Conclusion
Articles à scandales, [FUD](https://fr.wikipedia.org/wiki/Fear,_uncertainty_and_doubt), relais sur les réseaux sociaux : un cocktail explosif pour la diffusion de fake news qui est d'autant plus simple que les gens ne comprennent pas de quoi ils parlent sur une technologie complexe, donc cherchent la facilité et la trivialité des messages diffusés plutôt que la compréhension.
Dans le même esprit, mais écrit indépendamment et en anglais : https://endthefud.org/