# SOPK, personnes transmasculines & testostérone :::info *Support de pair-aidance écrit par biyokea (📩 `@biyokea` sur discord, `biyokea@fransgenre.fr` par mail) de l'association [Fransgenre](https://fransgenre.fr/), me contacter en cas d'erreur/imprécision ou pour toute suggestion.* *Une version retravaillée et traduite en anglais est disponible sur le site du [collectif WHSAH :link:](https://whsah.co/posts/pcos-transmascs-and-testosterone/).* ::: **Le syndrome des ovaires polykystiques (SOPK) est une entité médicale courante chez les femmes cis. Généralement considéré comme un trouble hormonal/reproductif, on oublie trop souvent sa dimension métabolique. Mal compris & pris en charge chez les femmes cis, il est aussi courant chez les personnes transmasculines, dont la prise en charge comprend quelques spécificités. Même chez les personnes transmasculines *sans* SOPK, le sujet est intéressant car source de mécompréhensions et permet de discuter de problématiques relatives à la recherche scientifique en santé trans.** **Aperçu des aspects relatifs au SOPK dans une transition hormonale et chez les personnes transmasculines : prévalence, lien causal entre prise de T et SOPK, et impact d'un SOPK sur la prise de testostérone.** :::success *Si seules les informations sur les considérations autour de la prise de testostérone quand on a un SOPK vous intéressent, allez lire directement la dernière partie : ++SOPK et prise de testostérone : un impact finaement assez limité++.* *Les encarts commençant par un microscope 🔬 sont une digression sur des problématiques de la recherche en santé trans mises en lumière par le contenu du reste de l'article.* ::: [ToC] # Le SOPK en (très) bref D'un point de vue diagnostique, le SOPK (PCOS en anglais) est défini par la présence d'au moins 2 des 3 critères suivants (**critères de Rotterdam**)[^rotterdam_2003] : - **oligo-ovulation ou anovulation** - **hyperandrogénie clinique et/ou biologique** - **ovaires de morphologie polykystique** (morphologie PCO) La combinaison de ces critères permet une classification en quatre phénotypes : | Phénotype A | Phénotype B | Phénotype C | Phénotype D | |:-----------------:|:-----------------:|:---------------:|:-----------------:| | hyperandrogénie | hyperandrogénie | hyperandrogénie | / | | oligo/anovulation | oligo/anovulation | / | oligo/anovulation | | morphologie PCO | / | morphologie PCO | morphologie PCO | C'est aussi un diagnostic d'exclusion, ce qui veut dire que les autres causes possibles doivent être préalablement exclues. Ces critères sont les plus couramment acceptés, mais ne font pas l'unanimité, d'un point de vue diagnostique comme pathophysiologique. En effet, le SOPK porte très mal son nom[^norman_2023] : la morphologie polykystique des ovaires n'est pas un élément essentiel ni même central au SOPK. Au contraire, l'**hyperandrogénie clinique ou biologique** (c'est-à-dire la présence d'androgènes mesurée dans une prise de sang ou l'activité androgénique visible, comme la pilosité faciale, plus importante que ce qu'on considère typique chez une femme cis dyadique, c'est-à-dire non intersexe) semble être une composante essentielle du SOPK, accompagnée de l'**insulinorésistance**, élément fondamental du SOPK au sens endocrino-métabolique, et pourtant souvent oublié. Sur le sujet, voir Unfer et al.[^unfer_2024]. Pour résumer, il est important de savoir que : - **la morphologie polykystique des ovaires n'est pas synonyme de SOPK** - **l'insulinorésistance et les troubles métaboliques sont des aspects essentiels mais souvent oubliés du SOPK** Enfin, si le SOPK n'est classiquement défini que chez la femme (et par extension, les personnes transmasculines), une **forme non-ovarienne de SOPK** ("male PCOS" ou SOPK dit "masculin" chez les hommes cis), caractérisée notamment par les aspects hyperandrogéniques et métaboliques du SOPK classique, commence à être reconnue dans la communautée scientifique[^diguardo_2020][^mettawi_2024][^lafci_2025]. **Les personnes transféminines peuvent donc aussi être concernées par le SOPK** ─ bien que cela dépasse le cadre de cet article. # Surreprésentation du SOPK chez les personnes transmasc ou problèmes de priorité dans la recherche ? ## Pourquoi étudier la prévalence du SOPK chez les personnes transmasculines ? Chez les femmes cis, le SOPK est fréquent - bien qu'il ne soit pas toujours diagnostiqué. La prévalence varie beaucoup selon divers facteurs, dont les critères diagnostiques utilisés : les estimations varient **entre 10-13%[^teede_2023] et jusqu'à 20%** en Europe et Amérique du Nord[^chiaffarino_2022]. On a longtemps pensé que le SOPK était plus fréquent chez les hommes trans et personnes transmasculines que chez les femmes cis, notamment dans un **contexte de recherches étiologiques de la dysphorie de genre** : peut-être que les hommes trans le sont car ils ont été exposés pré-natalement à des androgènes, ou peut-être parcequ'ils ont des taux d'androgènes plus élevés que la moyenne, comme c'est souvent le cas dans le SOPK ? Ces recherches, en plus d'être **profondément stigmatisantes, pathologisantes**, et en contradiction avec des valeurs comme l'auto-détermination ne sont aussi tout simplement pas concluantes (pour une revue critique, voir Levin et al., 2023[^levin_2023]). Ce contexte est important à garder en tête quand on interroge ces recherches sur le SOPK chez les personnes transmasculines, car il implique un positionnement de recherche qui n'est, comme toujours, pas neutre. ## Revue systématique de la littérature Ce contexte explique la grande quantité d'études examinant la prévalence du SOPK chez les personnes transmasculines. J'ai réalisé une revue systématique de la littérature [^details_revue_syst]. Le tableau 1 récapitule les études donnant des informations sur la prévalence du SOPK chez les personnes transmasculines, à partir du début des années 2000 jusqu'en 2025. Quelques études antérieures à la publication des critères diagnostiques de Rotterdam (2003) ont été exclues, car pour des raisons méthodologiques (critères diagnostiques non harmonisés et datés, échantillons de commodité et très faibles, etc.), leur valeur a été considérée comme très faible. | Étude | Pays | Échantillon | Type d'étude | Critères diagnostiques | Prévalence SOPK | Groupe controle | Répartition phénotypes Rotterdam | | ------------------------------------- | ---------- | ----------- | ------------------------------- | ------------------------------------------------------------ | ------------------------- | ------------------------------------------------ | ----------------------------------------------- | | Mueller 2008[^mueller_2008] | Allemagne | n=61 | cross-sectionnel bilan pré-THS | Rotterdam ; NIH 1990 | 14.8% ; 11.5% | ✅ (94 femmes cis), pas de différence | ❓, similaire au groupe controle | | Vujovic 2009[^vujovic_2009] | Serbie | n=76 | rétrospective bilan pré-THS | Rotterdam | 14.4% | ❌ | ❓ | | Baba 2011[^baba_2011] | Japon | n=238 | rétrospective bilan pré-THS | Rotterdam ; NIH 1990 ; AES | 32% ; 17% ; 25.8% | ❌ | ❓ | | Auer 2013[^auer_2013] | Allemagne | n=131 | rétrospective bilan pré-THS | AES (proche) | 2.3% | ❌ | ❓ | | Becerra-Fernández 2014[^becerra_2014] | Espagne | n=77 | rétrospective bilan pré-THS | Rotterdam | 36.4% | ❌ | ❓ | | Kutbay 2017[^kutbay_2017] | Turquie | n=48 | rétrospective bilan pré-THS | ❓ | 16.3% | ❌ | ❓ | | Valentine 2021[^valentine_2021] | États-Unis | n=4177 | rétrospective | ❓ | oR 1.9 [95% CI: 1.3, 2.8] | ✅ (appariement avec 4 AFAB sans diag dysphorie) | ❓ | | Yaish 2021[^yaish_2021] | Israël | n=56 | prospective&nbsp; bilan pré-THS | Rotterdam | 48.2% | ❌ | PhA : 18% PhB : 70% PhC : 11% PhD : 0% | | Gezer 2022[^gezer_2022] | Turquie | n=49 | cross-sectionnel bilan pré-THS | Rotterdam | 38.8% | ❌ | PhA : 26.3% PhB : 47.4% PhC : 15.8% PhD : 10.5% | | Vehmas 2022[^vehmas_2022] | Finlande | n=104 | rétrospective bilan pré-THS | ❓ | 1.9% | ❌ | ❓ | | Erel 2023[^erel_2023] | Turquie | n=70 | cross-sectionnel bilan pré-THS | Rotterdam | 22.9% | ✅ (34 femmes cis), prévalence 11.7% | ❓ | | Oğuz 2024[^oguz_2024] | Turquie | n=112 | cross-sectionnel bilan pré-THS | Rotterdam | 38.4% | ❌ | PhA : 20.9% PhB : 27.9% PhC : 46.5% PhD : 4.6% | | Rangi 2024[^rangi_2024] | États-Unis | n=105 | rétrospective bilan pré-THS | critères non standards (oligo/anovulation + hyperandrogénie) | 23.8% | ❌ | ❓ | | Calvar 2025[^calvar_2025] | Argentine | n=346 | rétrospective bilan pré-THS | Rotterdam | 26.6% | ❌ | PhA : 33.7% PhB : 39.1% PhC : 20.7% PhD : 6.5% | | Tordoff 2025[^tordoff_2025] | États-Unis | n=2579 | enquête cross-sectionelle | auto-questionnaire | 10.7% | ❌ | ❓ | *Tableau 1 : résultats de la revue systématique* Ces études trouvent fréquemment mais pas tout le temps une prévalence de SOPK, en se basant le plus souvent sur les critères de Rotterdam, assez élevée, ou en tous cas plus élevée que les estimations chez les femmes cis. Mais de nombreux biais empêchent de conclure à une plus forte prévalence du SOPK chez les personnes transmasc, comme l'**absence de groupe contrôle** (d'autant plus que la prévalence, les caractéristiques et l'attitude vis-à-vis du soin du SOPK peut varier de façon importante selon les zones géographiques, l'ethnie, et autres facteurs[^teede_2023][^vanhise_2023][^sendur_2021]) ou le **caractère rétrospectif des études** (en excluant les deux études qui n'ont pas été conçues avec un "dépistage" systématique du SOPK[^valentine_2021][^tordoff_2025], les deux tiers sont des études retrospectives, le tiers restant des études cross-sectionnelles). Il faut cependant noter quelques forces : par rapport aux études plus anciennes, la plupart des études présentées ici utilisent des critères diagnostiques bien définis et des échantillons de taille décente - même si elles examinent uniquement les personnes souhaitant accéder à un THS. Deux études un peu différentes se distinguent : Valentine et al., une étude rétrospective cas-témoins sur une large base de donnéees pédiatriques aux États-Unis, et Tordoff et al., un questionnaire basé sur la cohorte de l'étude PRIDE. L'étude de Valentine et al.[^valentine_2021] ne donne pas de prévalence du SOPK chez les jeunes ayant un diagnostic de dysphorie de genre, mais indique qu'elle est 1.9 fois supérieure à celle de contrôles appairés. Cependant, l'appariemment des contrôles ne prend pas en compte de nombreuses covariables importantes, et un fort biais de surdiagnostic des jeunes transmasculins est probable (par exemple, les jeunes femmes cis ne seront diagnostiquées avec un SOPK que si elles se plaignent de symptômes, alors que de nombreux jeunes avec un diagnostic de dysphorie de genre, et donc susceptible de vouloir accéder à un traitement hormonal, se verront imposer des bilans pré-THS et auront donc plus de chances d'être diagnostiqué·es avec un SOPK ─ d'autant plus si les médecins les examinant on déjà un seuil de suspicion faible pour un SOPK en raison de leur identité de genre) ─ rendant ce chiffre peu utile. L'étude de Tordoff et al.[^tordoff_2025] est une analyse des données de questionnaire remplie par la cohorte PRIDE, qui rapporte une prévalence du SOPK de 10.7% chez 2579 personnes transmasculines. Ce chiffre, sembable à la prévalence chez les femmes cis, se base sur les diagnostics rapportés par les participant·es, ce qui implique qu'il comprend les taux de diagnostics et pas seulement la prévalence elle-même. Pour conclure : - Des **études datées**, méthodologiquement faible, dans un **contexte de recherches étiologiques stigmatisantes**, ont pu trouver des prévalences de SOPK bien plus élevées chez les personnes transmasculines que chez les femmes cis. - Des études plus récentes, moins mauvaises d'un point de vue méthodologiques, aboutissent à des résultats inégaux, pointant vers une **prévalence du SOPK chez les personnes transmasculines parfois comparable à celle des femmes cis, parfois supérieure**. - Des **limitations méthodologiques empêchent une conclusion franche**, au delà d'un simple "les personnes transmasculines ont peut-être une prévalence du SOPK supérieure à celle des femmes cis", et ce malgré une quantité important d'étude - soulignant les **problèmes d'orientation de la recherche en santé trans**. ## 🔬 Ce que ces résultats montrent sur les priorités de la recherche en santé trans :::spoiler {state=open} :microscope: :arrow_heading_down: Un des principaux résultats de cette revue systématique est la quantité surprenamment élevée d'études évaluant la prévalence du SOPK chez les personnes transmasculines ─ surtout mise en parralèle avec l'absence d'étude examinant l'impact d'un THS chez les personnes transmasculines avec un SOPK ; ainsi que leur faible qualité. Comme d'habitude, **les chercheur·es cis examinent des personnes trans pour chercher à savoir ce qui les rends trans** (avec en toile de fond la possibilité bien réelle que ces résultats soient utilisés pour limiter qui est "autorisé·e" à être trans), **mais n'ont pas l'air de se soucier des données qui pourraient être utiles aux populations marginalisées qu'iels étudient**. Quasiment toutes ces études portent sur des bilans imposés à des personnes souhaitant obtenir un THS ─ principalement dans des centres dédiés à la prise en charge des personnes trans, où la participation à ce genre d'étude n'est pas réellement optionnelle. Cela pose un problème éthique, surtout pour des études qui ne vont pas aider d'autres personnes trans. En effet, il me parait important de noter que **la participation à ces études n'apporte rien aux personnes trans en question** (ni personnellement, ni d'un point de vue plus large vu le global manque d'utilité de ces études), mais leur impose des examens inutiles et parfois invasifs, comme les échographies pelviennes ou l'examen de leur pilosité corporelle ; s'incrivant aussi dans la **tradition d'exclusion des personnes intersexes** des parcours de transition institutionalisés. Il a été dit plus tôt que ces études étaient principalement réalisées dans le cadre de recherche étiologiques qui n'apportent rien aux personnes étudiées. Il est toutefois vrai que si ce contexte persiste encore, les études plus récentes prennent plutôt l'**angle des facteurs de risque cardiométaboliques**, en mettant en évidence que les personnes transmasculines se présentant pour accèder à un THS ont souvent des facteurs de risques cardiométaboliques défavorables et/ou moins favorables que ceux des femmes cis dans la population générale ─ et c'est d'autant plus le cas pour les personnes avec un SOPK. Si cette information n'est pas complètement inintéressante, elle n'est pas pour autant particulièrement utile. Les personnes trans en général présentent de nombreux facteurs de risques cardiométaboliques, pour des raisons probablement principalement liée à leur précarisation socio-économique et aux conséquences du stress minoritaire[^flentjes_2025][^streed_2021][^diamond_2021]. **Placer le SOPK comme seul (ou même comme principal) déterminant de ces facteurs de risque est politiquement contre-productif, essentialisant les conséquences sur la santé des discriminations vécues**. De plus, ces facteurs de risque sont aisément mesurables, et quitte à se concentrer sur les traitements hormonaux, une vraie approche préventive en santé trans bénéficierait plus d'études sur l'impact du SOPK sur la prise de testostérone que d'études sur l'état de santé pré-testostérone. ::: # La prise de testostérone cause un SOPK chez les personnes transmasc ? On entend parfois que la prise de testostérone chez les personnes transmasculine "cause" un SOPK, ou un état proche du SOPK ─ c'est une **idée assez intuitive dans une conception du SOPK comme**, grosso modo, **un excès de testostérone**. Elle n'est **pas vraie** pour autant : le SOPK est loin de se limiter à des taux de testostérone élevés et sa pathophysiologie est complexe. Il est aujourd'hui bien établi qu'une prise de testostérone et un SOPK sont deux situations bien distinctes. On peut examiner deux aspects principaux : les modifications métaboliques et les modifications de l'appareil reproductif. ## Modifications métaboliques : une évolution vers un profil masculin, différent d'un profil SOPK Le SOPK se caractérise entre autres par un profil métabolique assez spécifique, marqué notamment par des problématiques d'insulinorésistance. Ces modifications métaboliques (par rapport aux femmes cis sans SOPK) sont différentes de celles observées chez les personnes transmasculines sous testostérone, dont le profil métabolique se rapproche globalement du profil typique des hommes cis. La présence (ou non) de cette différence a été examiné dans l'étude de cohorte de Cupisti et al.[^cupisti_2010]. Cette étude observe l'insulinorésistance et les paramètres lipidiques chez des personnes transmasculines (pré-T puis à 1 an de T, n=29) et chez des femmes cis ayant un SOPK. Les auteurices trouvent que la prise de testostérone n'a pas d'influence sur l'insulinorésistance et que si les paramètres lipidiques sont bien modifiés avec la T, ils aboutissent à un profil différent de celui des femmes cis ayant un SOPK. Sur le même sujet, l'analyse rétrospective de Chan et al.[^chan_2018] examine l'évolution du profil métaboliques (Hb1Ac et lipides) de personnes transmasculines (n=34) pendant leur prise de testostérone, sur 6 ans, et le compare aux profils typiques féminins (avec ou sans SOPK) et masculins. Les auteurices trouvent que le profil métabolique des personnes sous testostérone évolue vers un profil typique masculin et non vers un profil typique féminin SOPK. Ces études sont intéressantes dans leurs comparaisons directes entre prise de T et SOPK, mais restent limitées, notamment dans la taille de leur échantillon. Une récente méta-analyse par Tienforti et al.[^tienforti_2024] portant sur les aspects métaboliques des personnes transmasculines sous testostérone (IMC, ratio taille-hanches, composition corporelle, profils lipidiques et glycémiques) offre un solide aperçu global de la question et **démontre clairement des changements métaboliques s'alignants sur des valeurs typiques masculines et non associées au SOPK**. ## Modifications de l'appareil reproductif : des ovaires parfois polykystiques, mais des changements distincts du SOPK Le SOPK se caractérise aussi par une morphologie des ovaires particulière (morphologie polykystique, ou parfois «micropolykystique» en français). En anglais on parle de PCOM : polykystic ovarian morphology. **Cette morphologie PCO n'est, malgré son nom, pas vraiment définie par la simple présence de plusieurs kystes ovariens.** Les "kystes" du SOPK n'en sont pas tout à fait : **il s'agit en fait de follicules** (une structure ovarienne secrétant des hormones et contenant un ovocyte) **dont le développement a été arrêté prématurément** et qui au lieu de disparaître (par atrésie folliculaire) tendent à s'accumuler, formant une structure ressemblant à une multitude de petits kystes[^balen_2003][^chang_2013][^witchel_2019]. Dans les critères de Rotterdam[^rotterdam_2003], la morphologie PCO est définie par la présence à l'échographie d'au moins 12 follicules de 2-9 mm de diamètre (par ovaire) et/ou par un volume ovarien important (≥10 mL). L'aspect (échogénicité, volume, densité) du stroma ovarien (tissu connectif des ovaires) est mentionné comme une des caractéristiques de la morphologie PCO, mais n'est pas nécessaire au diagnostic, le volume ovarien en étant un bon substitut[^balen_2003]. Aujourd'hui, en raison de l'amélioration des techniques d'échographie, on utilise de préférence le compte de follicules (ou la mesure de l'AMH, voir ci-dessous), en définissant une **morphologie PCO à partir de 20 follicules par ovaire**[^teede_2023]. Ces nouveaux critères insistent sur le fait qu'**une morphologie PCO est fréquente et n'est, seule, pas indicatrice d'un SOPK**. Cette morphologie est d'autant plus fréquente chez les personnes jeunes (60% des 25-30 ans[^johnstone_2010], plus chez les adolescent·es), et en utilisant une valeur seuil inférieure à 20 follicules. On parle parfois d'ovaires multicystiques pour une quantité importante mais plus faible de follicules, généralement un peu plus larges que dans dans les ovaires polykystiques, et avec un aspect du stroma plus typique[^balen_2003]. Comme cette morphologie, qu'on associait plus fortement au SOPK dans le passé, est partiellement liée aux androgènes (cf encart ci-dessous), dans le SOPK comme dans de nombreux modèles animaux, on a longtemps pensé que la prise de testostérone induisait forcément une morphologie PCO chez les personnes transmasculines. :::spoiler Formation de la morphologie PCO et possible rôle des androgènes :arrow_heading_down: Les follicules se développent par cycles, de façon continue. Initialement, plusieurs follicules commencent à se développer, passant du stade primordial au stade primaire, puis secondaire, puis tertiaire. Là, la majorité du groupe de follicules qui se développaient meurent par atrésie folliculaire et les quelques follicules restants continuent à se développer : ce sont les follicules antraux. Petit à petit, tous meurent par atrésie, sauf un, le follicule dominant, qui se développe rapidement et devient le follicule pré-ovulatoire. Il libère son ovocte (ovulation), devient un corps jaune, puis meurt[^cox_2025]. Ce processus (folliculogénèse) est regulé par des processus hormonaux complexes, qui peuvent dysfonctionner. On fait généralement l'hypothèse qu'un excès d'androgènes peut stimuler et bloquer le développement de follicules en début de leur cycle de vie (stade pré-antral et antral), causant une accumulation de follicules à l'origne de la morphologie PCO ; mais de nombreux autres facteurs sont aussi en jeu[^chang_2013]. De plus, la morphologie PCO se retrouve aussi dans des sous-type de SOPK en l'absence d'un excès d'androgène, impliquant un mécanisme différent[^unfer_2024]. ::: L'idée de la testostérone comme causant des ovaires de morphologie PCO a été confirmée par des études anciennes, souffrant de défauts méthodologiques similaires à ceux des études de prévalence : faibles échantillons, absence de groupe contrôle, définitions variables et peu précises, etc. Une récente revue systématique examinant notamment les ovaires (morphologie, histopathologie) de personnes transmasculines sous testostérone (11 études, 410 patient·es, 765 ovaires) trouve des **ovaires d'apparence polykystique dans ~35% des personnes** ─ une proportion similaire à celle de la population générale[^toland_2023]. De plus, les résultats d'études avec une meilleure méthodologie ne soutiennent pas les résultats de ces études plus anciennes. Notamment, l'étude d'Ikeda et al.[^ikeda_2013], qui compare les ovaires de 11 personnes transmasculines sous testostérone et celles de femmes cis contrôles, toustes sans SOPK, sur le plan histopathologique, trouve des **modifications histologiques semblables au SOPK, mais pas de morphologie PCO** (selon les critères de Rotterdam). Les ovaires des personnes sous T comportaient notamment un cortex ovarien plus épais et une hyperplasie du stroma ovarien, mais la quantité de follicules (en début de développement comme au stade antral) était similaire à celle des contrôles. Des études ultérieures font des conclusions similaires, et trouvent des **taux de morphologie PCO similaires chez des personnes sous testostérone et des contrôles**. Pour une revue, voir la section *Reproductive Health Considerations* de Kumar et al.[^kumar_2022] En plus de la morphologie ovarienne typique, le SOPK est associé à un **taux élevé d'AMH** (hormone anti-müllérienne, utilisée pour évaluer la réserve ovarienne). Cette élévation est d'ailleurs parfois utilisée dans le diagnostic du SOPK et peut être un **marqueur diagnostique de morphologie PCO** (à la place du volume ovarien/compte de follicule par échographie)[^dumont_2015][^teede_2023]. Elle pourrait être, selon certaines hypothèses, liée aux taux d'androgènes élevées fréquemment retrouvés dans le SOPK. Mais, ici encore, ce constat ne s'extrapole pas aux personnes transmasculines sous testostérone. Il existe peu d'études observant les **évolutions d'AMH avec la prise de testostérone**, mais les résultats varient entre une forte diminution de l'AMH et un impact faible à nul ─ mais **pas d'élévation**[^yaish_2021]. Les subtilités pouvant expliquer ces observations ne sont pas bien connues : il pourrait y avoir un effet de seuil expliquant un impact différent entre des taux de testostérone modérément élevés (SOPK) et franchement élevés (prise de testostérone) ; il pourrait y avoir des spécificités, distinctes de la simple activité androgénique, propre au SOPK. Ainsi, une étude évaluant de façon prospective les taux d'AMH chez 56 personnes commençant la testostérone trouve une faible diminution des taux d'AMH à 1 an de testostérone. En faisant une analyse de sous groupe, les auteurices trouvent que les taux d'AMH n'ont en fait baissé que chez les personnes transmasculines avec un SOPK (n=27, diagnostiqué pré-THS), et n'ont pas évolué chez les autres[^yaish_2021]. En tous cas, ces observations renforcent l'idée que **les évolutions ovariennes sous testostérone sont différentes de celles retrouvées dans le SOPK**. Une autre caractéristique du SOPK est la fréquente **présence d'un endomètre épais** (>7mm), en raison de l'anovulation chronique qui expose l'endomètre à une action oestrogènique non opposée par la progéstérone[^unfer_2024]. Cette anovulation est fréquemment associée à une présence atypiquement importante d'androgènes. Cette épaisseur augmentée de l'endomètre est un facteur de risque d'hyperplasie endométriale et une possible explication pour l'association entre SOPK et risque augmenté de cancer de l'endomètre. Là encore, la situation des personnes sous testostérone est très différente. **L'épaisseur de l'endomètre de personnes sous testostérone est plus faible que celle de contrôles**[^asseler_2022], et il est rare que l'endomètre soit hyperplasique[^toland_2023]. De plus, il ne semble pas y avoir de surrisque de cancer de l'endomètre chez les personnes sous testostérone[^vestering_2025], bien qu'on manque encore de données. ## 🔬 Si le SOPK et la prise de testostérone n'ont rien à voir, pourquoi ces comparaisons ? :::spoiler {state=open} :microscope: :arrow_heading_down: Les résultats présentés ci-dessus (modifications métaboliques) ne sont pas étonnants : **un changement vers un profil typique masculin sous testostérone (ou féminin sous oestrogène) est retrouvé quasi-systématiquement pour un ensemble très large de paramètres physiologiques**, allant des tests biologiques courants[^nolan_2025] à la méthylation de l'ADN[^shepherd_2022] en passant par le métagénome fécal[^liwinski_2024] (quand il y a des différences entre les deux profils, ce qui est loin d'être systématique). **Pourtant, on s'obstine à comparer les hommes trans aux femmes et les femmes trans aux hommes** ; que ce soit avec les incessantes comparaisons entre prise de testostérone et SOPK dans la littérature scientifique, notamment pour examiner les risques des THS (bien que cela n'ait rien à voir), ou en calculant le surrisque de cancer du sein des femmes trans par rapport aux hommes cis et non aux femmes cis, concluant à des taux qui paraissent alarmants mais ne sont pas nécessairement représentatifs. Cette comparaison me semble venir de l'**idée sous-jacente que l'identité de genre, relevant du ressenti intime et du social, est décorative, contrairement au sexe, réalité biologique et immuable (les personnes trans changeraient de genre mais pas de sexe), qui serait la varaible importante en médecine**. Et donc on conçoit les hommes trans et personnes transmasculines sous THS comme des femmes qui prennent de la testostérone. Comme on conçoit beaucoup le SOPK sous l'angle des androgènes, on se dit que ce sont deux situations qui ont beaucoup de similitudes, alors qu'il n'en est rien : le SOPK est caractérisé par bien d'autres choses que les androgènes, qui jouent un rôle dans sa pathophysiologie sans qu'on puisse établir qu'ils en sont la cause ; les taux de testostérone dans le cadre d'un SOPK et d'une prise de testostérone sont très différents, le contexte psychologique et les implications socio-économiques n'ont pas grand chose à voir. On pourrait pourtant établir d'autres comparaisons, par exemple avec les hommes cis avec hypogonadisme qui prennent de la testostérone, mais aussi avec des hommes trans & personnes transmasculines qui ne prennent pas ou ne prennent plus de THS, etc. Cela éliminerait les variables au SOPK lui-même et permettrait des taux de testostérone ou un contexte psycho-social plus similaire. **Mais ces comparaisons ne sont faites que trop rarement ─ car les personnes trans sont trop fréquemment conçues par les chercheur·es comme appartenant à leur sexe assigné**. Et ce biais transphobe à l'origine de ces comparaisons n'est pas sans effet : en plus d'être un **rappel constant de l'assignation de genre passée**, créant un environnement hostile aux personnes trans, ces comparaisons amènent à des **conclusions hâtives, parfois alarmistes** et souvent manquant de nuance. **Elles n'apportent rien à la recherche et au contraire, créent des angles morts au détriment de la santé des personnes trans.** Par exemple si on part du princip que la testostérone n'est pas une hormone adaptée à un corps "féminin" (transmasculin), alors on peut chercher à attribuer tous les problèmes cardiovasculaires des personnes transmasculines sous THS à la testostérone, au lieu de prendre en compte l'impact du stress minoritare. Ou si on pense que les oestrogènes sont fondamentalement inadaptées aux corps "masculins" (transféminins), on peut vouloir attribuer des problèmes de santé des personnes transféminines comme l'ostéoporose aux oestrogènes elles-même, sans envisager qu'ils puissent découler du sous-dosage qu'elles subissent. [^nolan_2025]: [Laboratory Monitoring in Transgender and Gender-Diverse Individuals :link:](https://doi.org/10.1093/clinchem/hvaf001). Nolan BJ et al., 2025. [^shepherd_2022]: [Gender-affirming hormone therapy induces specific DNA methylation changes in blood :link:](https://doi.org/10.1186/s13148-022-01236-4). Shepherd R et al., 2022. [^liwinski_2024]: [Gender-affirming hormonal therapy induces a gender-concordant fecal metagenome transition in transgender individuals :link:](https://doi.org/10.1186/s12916-024-03548-z). Liwinski T et al., 2024. ::: # SOPK & prise de testostérone : un impact finalement assez limité Après avoir longuement discuté des personnes transmasculines sans SOPK (qui, on l'a vu, n'en développeront pas en raison de la prise de testostérone), il reste à aborder le sujet des personnes ayant un SOPK et souhaitant prendre de la testostérone. ## Généralités **Le SOPK n'est en aucun cas une contre-indication à la prise de testostérone**. En cas de suspicion de SOPK, il vaut mieux établir le diagnostic avant de commencer la testostérone (qui complique voire empêche un diagnostic dans le futur). Cependant, **établir le diagnostic ne doit pas retarder le début du THS**. Conformément aux recommandations internationales de 2023[^teede_2023], **la clinique et la prise de sang suffisent à poser le diagnostic**. La prise de sang sert alors de bilan pré-THS ([modèle ici :link:](https://partagenre.fransgenre.fr/ressources/prise-de-sang-initiation-ths)) et de bilan diagnostic du SOPK. Le taux d'AMH peut être utilisé à la place du comptage folliculaire, afin d'**éviter une échographie pelvienne** (généralement par voie vaginale) ─ les alternatives aux examens gynécologiques étant à privilégier quand c'est possible chez les personnes transmasculines, qui les vivent souvent mal. ![image](https://hackmd.io/_uploads/BJ5qOb5cex.png) *Algorithme extrait des recommandations 2023[^teede_2023], les consulter pour plus de détails.* De plus, **le SOPK ne nécessite pas d'ajustement de dosage** par rapport aux dosages standards. L'élévation des taux d'androgènes pré-THS n'est pas toujours présente et quand elle l'est, reste négligeable par rapport aux taux visés classiquement sous testostérone. Il s'agit d'un facteur anecdotique parmi d'autres facteurs de variation inter-individuelle, on peut donner simplement commencer avec un dosage standard[^prescription_THSM] et l'ajuster selon les résultats de prise de sang et les ressentis. ## Impact sur la santé : un manque cruel d'information mais des données rassurantes Le SOPK est associé à un risque élevé de certaines problématiques de santé ; la prise de testostérone peut influencer ces risques. ### Insulinorésistance et maladies cardiovasculaires Le SOPK est associé à divers facteurs de risques cardiovasculaires (insulinorésistance, diabètes, dyslipidémie) ainsi qu'à un surrisque de maladies cardiovasculaires. **Il est recommandé de faire un bilan glycémique & lipidique au moment du diagnostic, et de suivre le statut glycémique (idéalement avec test HPGO, sinon HbA1c + GaJ) tous les 1-3 ans**. La prise de testostérone chez les personnes transmasculines est fréquemment associée à certains de ces facteurs de risques cardiovasculaires, ainsi que parfois, mais pas toujours, à un surrisque ou une surmortalité cardiovasculaire. Il faut noter que la causalité de cette relation est toutefois loin d'être établie. Ainsi, des facteurs comme le stress minoritaire peuvent aussi en être responsables, et des études sur des personnes trans trouvent un surrisque par rapport aux personnes cis, mais pas par rapport aux personnes trans ne prenant pas de THS[^karalexi_2022][^glintborg_2022] ─ ce qui **semble indiquer un rôle des facteurs liés au fait d'être une personne trans (précarité socio-économique, stress minoritaire, ...) et non du THS**. Du point de vue lipidique, la testostérone semble avoir un effet défavorable, quoique faible. Du point de vue de l'insulinorésistance, la testostérone semble avoir un effet favorable, quoique faible[^tienforti_2024] L'interaction des effets du SOPK et de la prise de testostérone, qui reposent sur des méchanismes différents, n'est que très peu connue. Cependant, de façon encourageante, une récente analyse rétrospective de personnes transmasculines avec ou sans SOPK commençant la testostérone **n'observe *pas* de modification de facteurs de risque cardiovasculaires plus importante chez les personnes ayant un SOPK**[^mcneil_2024]. **Il est envisageable que la prise de testostérone ait un effet positif, ou a minima neutre, sur l'insulinorésistance dans le SOPK** ─ mais les données manquent cruellement. Il parait donc raisonable de suivre simplement les recommandations de suivi pour les femmes cis ayant un SOPK (surveillance du statut glycémique), à adapter selon la clinique ; en accord avec les recommandations de Fenway Health[^fenway_rec] et de l'UCFS[^ucfs_rec]. ### Hyperplasie et cancer de l'endomètre Comme mentionné plus tôt, on retrouve fréquemment dans le SOPK un endomètre épais, facteur de risque d'hyperplasie puis de cancer de l'endomètre. **Comme le risque absolu de cancer de l'endomètre reste faible, un dépistage systématique n'est pas recommandé** chez les femmes cis avec un SOPK. En revanche, des actions d'information et de prévention sont recommandées. Dnas le SOPK, les problèmes d'ovulation sont considérés comme responsables de l'épaississement de l'endomètre : l'anovulation chronique modifie le cycle menstruel, avec une exposition plus longue de l'endomètre à l'action des oestrogènes sans opposition par la progestérone. Or c'est la progestérone qui empêche la prolifération endométriale. L'amnénorrhée (absence de règles) chronique en est un marqueur.[^teede_2023] Pour des raisons similaires, on a longtemps supposé que les personnes transmasculines prenant de la testostérone étaient à plus fort risque de cancer de l'endomètre. On a fait l'hypothèse que l'estradiol en laquelle se métabolise une partie de la testostérone prise pouvait être à l'origine de prolifération endométriale, ou que l'action androgénique de la testostérone pouvait en être responsable directement. Mais des données plus récentes sont rassurantes : l'activité des androgènes sur l'endomètre est complexe mais tend à être antiproliférative[^gjorgoska_2022] et chez les personnes transmasculines sous testostérone, l'endomètre s'amincint[^asseler_2022] et est rarement hyperplasique [^toland_2023]. De plus, il ne semble pas y avoir de surrisque de cancer de l'endomètre avec une prise de testostérone, que ce soit chez les femmes cis post-ménopause ou chez des personnes transmasculines[^vestering_2025] ─ bien que les données restent parcellaires. Il est donc **concevable que la testostérone ait un effet positif, ou a minima neutre, sur le risque de cancer de l'endomètre associé au SOPK**. Ainsi, aucun suivi particulier ne semble nécessaire. ### Santé mentale Chez les femmes cis, il est désormais reconnu que le SOPK est associé à une moins bonne santé mentale : dépression, anxiété, image de soi, troubles du comportement alimentaire, etc.[^teede_2023] Ce fait ne peut être dissocié des pressions genrée et de la grossphobie dont sont couramment victimes ces femmes. Étant intimement lié à l'expérience de genre, il n'est pas étonnant que le vécu des personnes transmasculines (et trans et queer en général) puisse être différent. Par exemple, certains aspects liés à la présence plus importante d'androgène, ou l'amnénorrhée sont fréquemment bienvenus chez les personnes transmasculines ─ même si bien sûr, les expériences varient selon les individus[^wugalter_2024]. Une étude comparant des personnes transmasculines avec ou sans SOPK et pré-THS a observé une dysphorie de genre moins importante, une meilleure image corporelle et une plus grande qualité de vie chez celleux ayant un SOPK[^gezer_2022]. Si on manque cruellement de données, **il parait plausible que le SOPK ait des effets positifs sur la santé mentale des personnes transmasculines** (notamment pré/sans THS), à l'inverse des femmes cis. Le SOPK reste tout de même sûrement associé à des effets négatifs, notamment en raison des discriminations et obstacles supplémentaires qui peuvent être rencontrés. Quoi qu'il en soit, il est établi que la santé mentale des personnes trans tend à être moins bonne que celles des personnes cis, notamment en raison du stress minoritaire et des discriminations subies. Il convient de prendre en compte ces faits chez les personnes trans ayant un SOPK, et de veiller à **éviter de les exacerber, notamment avec des comportements grossophobes**. ## Fertilité Le SOPK peut impacter la fertilité, principalement en étant à l'origine de problèmes d'ovulation, mais aussi en étant associé à plus de complications (fausse couche, diabète gestationel, pré-éclampsie, ...) lors de la grossesse. Les effets de la testostérone sur la fertilité des personnes transmasculines sont variés et encore trop mal connus, mais les données actuelles sont rassurantes. Pour une revue complète, voir de Roo et al.[^de_roo_2025]. Les données sur la fertilité des personnes transmasculines sous testostérone ayant un SOPK sont encore plus limitées. Les études parues ne contiennent généralement pas d'information sur l'éventuelle présence de SOPK chez les participant·es. Une étude[^yaish_2021], décrite plus tôt, examinant des marqueurs de réserve ovarienne de personnes transmasculines sous testostérone, avec ou sans SOPK, montre une faible baisse du taux d'AMH avec la testostérone chez les personnes avec SOPK uniquement. Une tendance similaire (mais non significative) a été identifiée pour le compte de follicules. Les deux marqueurs restent dans des valeurs normales même chez les personnes avec SOPK. Les auteurices font l'hypothèse que la plus grande baisse de réserve ovarienne chez les personnes avec SOPK est simplement due aux différences pré-testostérone ; ou que la testostérone a un impact différent chez les personnes avec SOPK dont l'axe gonadotropique est dérégulé. Les auteurices notent que le temps sous testostérone ne semble pas avoir d'impact sur la réserve ovarienne, sauf peut-être faiblement chez les personnes avec SOPK. Au-delà de ces données, rassurantes mais limitées, **les mécanismes d'action sur la fertilité du SOPK et de la testostérone dans le cadre d'un THS sont distincts**. **Il ne semble pas y avoir de motifs d'inquiétudes particuliers vis-à-vis de la fertilité** des personnes avec un SOPK et prenant de la testostérone (au-delà de l'impact standard de la SOPK et de la testostérone séparement). Si une utilisation de ses propres gamètes est souhaitée, surtout à long terme, une préservation de fertilité (conservation d'ovocytes) devra être envisagée avant ou dans les quelques années suivant le début de la testostérone. Le projet parental devra être accompagné, généralement par un arrêt de la testostérone ─ quoique cette recommandation commence à être remise en question[^pfeffer_2023], et une prise en charge similaire à celle des femmes cis ayant un SOPK (traitement de l'anovulation et prévention des complications). ## En pratique : j'ai un SOPK et veux prendre de la testostérone, que faire ? Pas grand chose de spécifique, mais quelques points peuvent être utiles à savoir : :::info - Si un diagnostic formel n'a pas été posé mais que tu aimerais que ce soit le cas, mieux vaut le faire avant de commencer la testostérone. **Une échographie vaginale n'est pas obligatoire** pour la diagnostic et peut généralement aujourd'hui être remplacée par une prise de sang. - Le SOPK n'est pas une contre-indication à la testostérone et ne nécessite **pas de dosage particulier**. Si tu es gros·se, on ne doit pas exiger de toi que tu perdes du poids afin de commencer la testostérone. - Si taon médecin ne te le propose pas, demande-lui un **suivi de ton statut glycémique**, une prise de sang tous les 1 à 3 ans suffit, afin de pouvoir découvrir tôt et traiter d'éventuelles complications type diabète. - Si tu arrêtes la T et n'a pas de reprise de règles sous plusieurs mois, ou si tu as des saignements vaginaux prolongés sous T (hors changement de dose et si c'est inhabituel pour toi), consulte un·e médecin. - Si tu as des symptômes de SOPK, y compris des problèmes d'insulinorésistance, et qu'on te dit que le traitement est perdre du poids : c'est de la **grossophobie** et ce n'est pas justifié médicalement. Selon ton cas, des modifications diététiques, de l'exercice physique, et des traitements médicamenteux doivent t'être proposés, en prenant en compte tes possibilités et circonstances personnelles, et **sans que la perte de poids ne soit le but** : ce n'est généralement pas une variable très pertinente. ::: # Besoin d'aide ou de soutien ? Même si, en soi, le SOPK n'a que peu d'impact sur un THS, c'est un sujet qui peut être source de beaucoup d'interrogations quand on es trans, par exemple quand un·e médecin nous donne des informations inexactes ou est maltraitant·e, et autour duquel on peut avoir besoin d'échanger avec d'autres personnes dans une situation similaire. N'hésitez pas, en tant que personne trans, **à solliciter Fransgenre** pour un avis, en cas de question ou si besoin d'échanger (via [notre discord :link:](https://partagenre.fransgenre.fr/ressources/serveur-discord-fransgenre), par mail : `contact@fransgenre.fr` ou via nos réseaux sociaux). Et pour les médecins : n'hésitez pas à contacter Fransgenre pour une [**formation** :link:](https://fransgenre.fr#formation) ou une **question clinique** via notre adresse mail dédiée : `formation@fransgenre.fr`. <br> *Illustration :frame_with_picture: : Potential update to clinical guidelines, Unfer et al.[^unfer_2024]* [^norman_2023]: [“Tis but thy name that is my enemy”—the problem with the naming of polycystic ovary syndrome :link:](https://doi.org/10.1016/j.fertnstert.2023.03.028). Norman RJ et al. (2023). [^rotterdam_2003]: [Revised 2003 consensus on diagnostic criteria and long-term health risks related to polycystic ovary syndrome :link:](https://doi.org/10.1016/j.fertnstert.2003.10.004). The Rotterdam ESHRE/ASRM-Sponsored PCOS Consensus Workshop Group. (2004). [^unfer_2024]: [When one size does not fit all: Reconsidering PCOS etiology, diagnosis, clinical subgroups, and subgroup-specific treatments :link:](https://doi.org/10.1016/j.endmts.2024.100159). Unfer V et al. (2024). 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