# Les droits d'auteurices pour les podcasts diffusés sur Spectre

Il y a trois aspects à prendre en compte pour la citation :

* L’éthique
* La loi et la jurisprudence
* Les règles et le mode de fonctionnement des plateformes sur lesquels le podcast sera diffusé.

Toute utilisation ou toute citation de contenus (photo, illustration, extrait vidéo, musique, etc.) dont vous n’êtes pas l’autrice·eur ou l’unique auteur·rice1 se doit de respecter des règles basiques.

Ces règles sont essentielles et incontournables, pour garantir la pérennité de votre podcast et de Spectre, pour éviter d’avoir à payer des amendes, d’être censuré·es, et plus simplement pour des questions d’éthiques vis-à-vis des créateurs et créatrices de contenus.

### L’éthique de la citation

L’éthique est primordiale pour des podcasts militants, d’autant que de nombreux et nombreuses créateur·rices ont beaucoup de difficulté à vivre de leur travail et sont parfois en grande précarité.

Du point de vue éthique il y a deux règles à observer :

* D’une part, il faut systématiquement citer les auteur·rices des contenus cités ou utilisés (c’est a minima une question de respect et de politesse)
* D’autre part, il faut s’assurer auprès de leurs autrice·eurs de leur consentement à cette utilisation (pour cela un simple message sur les réseaux sociaux est souvent suffisant).

Il est en général plus que fréquent que les créateur·rices indépendant·es consentent la réutilisation de leurs œuvres pour des projets à but non lucratif, mais il est aussi très mal vu (à juste titre) de reprendre des contenus sans citer le créateur et sans lui avoir demandé son avis.

Il faut garder à l’esprit que certain·es créatrice·eurs pourraient en effet ne pas être d’accord avec le fond ou la forme de vos podcasts, ou pourraient plus simplement craindre d’être associé·es à des contenus militants (il n’est pas rare pour un·e créateur·rice de devoir travailler avec des entreprises ou des institutions peu engagées pour boucler les fins de mois).

Enfin, ces métiers sont particulièrement difficiles, et voir des actrices et acteurs engagé·es ne pas respecter ces règles basiques peut être un peu désespérant.

### La citation du point de vue juridique

Chaque « œuvre de l’esprit » (c’est le terme consacré par la loi) est protégée par le droit de la propriété intellectuelle. Ces droits peuvent appartenir à différentes catégories d’acteurs :

* L’autrice ou l’auteur (l’écrivain·e, le ou la compositeur·rice, le ou la photographe, la ou le réalisatrice·eur, etc.) ;
* l’artiste-interprète, soit la personne qui exécute ou interprète l’œuvre, comme les musicien·nes, comédien·nes et chanteuse·rs ;
* le ou la producteur·rice de l’œuvre, soit « la personne physique ou morale qui prend l’initiative et la responsabilité de la réalisation de l’œuvre » (Article L132-23 du code de la propriété intellectuelle). L’autrice·eur peut également être le producteur·rice ;
* la chaine de la télévision, la radio ou l’organisme de diffusion détient également des droits sur les programmes (émission, documentaire, film, etc.) qu’il ou elle diffuse.

Dans les faits, si vous utilisez tout ou partie d’une œuvre, il vous faut l’accord des ayants droit (y compris pour un habillage musical ou la diffusion d’extraits audio). Ainsi lorsque l’œuvre n’est pas encore tombée dans le domaine public, l’autrice·eur est titulaire d’un droit d’exploitation qui lui permet d’autoriser ou d’interdire toutes les utilisations faites de son œuvre.

Attention : L’identification des titulaires de droit est parfois difficile, voire impossible, mais cette difficulté ne pourra jamais justifier l’exploitation d’une œuvre réalisée sans le consentement des titulaires de droit. Autrement dit, l’impossibilité d’identifier le titulaire des droits ou de prendre contact avec lui, tout comme son absence de réponse, doivent conduire à considérer que la ressource protégée par la propriété intellectuelle ne peut être exploitée au-delà des limites définies par le législateur.

#### Il y a deux grands types de droits (en France) :

**Le droit moral**

Limites :

* Il est toujours attaché à l’auteur·rice (il ne peut donc être cédé) ;
* Il n’est pas limité dans le temps et est transmissible aux héritier·es (là aussi sans limite de temps)
* par exemple les héritier·es de Victor Hugo ou Jean de La Fontaine (s’iels sont identifiables) peuvent toujours faire valoir leur droit moral.

Implique :

* Droit de divulgation :
* seul·e l’autrice·eur a le droit de divulguer son œuvre ;
* Droit de paternité :
* l’auteur·rice peut apposer son nom sur son œuvre et exiger que son nom soit mentionné (que vous le citiez en l’occurrence) ;
* Droit au respect de l’intégralité de l’œuvre :
* l’autrice·eur peut s’opposer à toute modification, suppression ou ajout susceptible de modifier son œuvre (je ne peux pas éditer une version des Misérables modifiée ou enrichie d’un chapitre supplémentaire sans l’accord des héritier·es de Victor Hugo) ;
* Droit de retrait et de repentir :
* L’auteur·rice peut demander le retrait à tout moment de son œuvre, toutefois l’autrice·eur ne peut exercer ce droit qu’en indemnisant le cas échéant préalablement le cessionnaire (a priori ça ne nous concerne pas).

**Les droits patrimoniaux**

Limites :

* Ils sont limités dans le temps :
* Les droits patrimoniaux durent 70 ans après la mort de l’auteur·rice ou après sa divulgation si l’œuvre appartient à une personne morale. Au-delà, l’œuvre tombe dans le domaine public.
* Ils sont cessibles

Impliquent :

* Les droits d’exploitation :
* Notamment le fait d’utiliser tout ou partie d’une œuvre. Par exemple, prendre une photo et la retoucher ou faire un montage avec plusieurs implique d’avoir l’autorisation des ayants droit.
* Les droits de représentation :
* La représentation consiste dans la communication de l’œuvre au public par un procédé quelconque
* Les droits de reproduction
* La reproduction consiste dans la fixation matérielle de l’œuvre par tous procédés qui permettent de la communiquer au public d’une manière indirecte. Il s’agit ici de la duplication de l’œuvre.

**Attention** : Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction de l’œuvre par un procédé quelconque.

### L’exception de courte citation

La loi prévoie un certain nombre d’exceptions aux droits patrimoniaux (c’est là que réside toute la subtilité et la difficulté pour nous) permettant l’utilisation de l’œuvre ou d’une partie de l’œuvre sans autorisation de son autrice·eur.

Attention : ces exceptions sont assez mal définies juridiquement, et rarement respectées par les plateformes type YouTube.

L’article L122-5 du code de la propriété intellectuelle autorise la citation de courts extraits sans autorisation sous réserve que :

« soient indiqués clairement le nom de l’auteur et la source »

« Les analyses et courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information de l’œuvre à laquelle elles sont incorporées. »

Toute la subtilité repose ici dans la notion de « court » extrait. L’appréciation de cette notion dépend en général des juges, mais la jurisprudence (les précédentes décisions juridiques sur la question) nous donne quelques indications :

On ne peut citer l’œuvre dans son intégralité

Par exemple il n’est pas possible même pour un morceau de moins d’une minute de le diffuser en intégralité dans un podcast, même si le podcast fait 1 h

La citation doit être intégrée dans un nouvel ensemble et ne peut pas constituer seule la totalité du contenu (du podcast en l’original)

Par exemple votre podcast ne peut pas simplement être la reprise pure et simple d’un extrait d’un discours célèbre sans analyse ou ajout

De manière générale la justice estime que la durée de citation doit être proportionnelle à la durée de l’œuvre originale et de l’œuvre nouvelle (ce qui est très flou, mais la jurisprudence française considère qu’il ne faut pas dépasser les 10 % de l’œuvre originelle)

Il vaut mieux éviter les longues citations dans un podcast très court

Il est plus acceptable de citer un extrait de 2 min d’un film de 2 h, que d’un court métrage

Dans tous les cas, il faut respecter le droit moral :

L’œuvre doit déjà avoir été divulguée par son autrice·eur ;

L’extrait cité doit être clairement délimité afin d’éviter tout risque de confusion entre œuvre citée et œuvre citante ;

L’œuvre ne doit pas être dénaturée, le fait par exemple de sortir un morceau de texte ne doit pas avoir pour effet d’en changer le sens ;

L’œuvre nouvelle ne doit pas rendre l’information citée inexacte, déformée ou dénigrante, ni porter atteinte à la personne filmée, à sa réputation, etc. L’insertion de l’œuvre citée dans l’œuvre citante doit être « loyale ». Il convient de faire attention, donc, au traitement des images sorties de leur contexte. Leur force suggestive permet de manipuler aisément le public. L’image doit être conforme à son propos et au commentaire qui l’accompagne.

Il convient d’indiquer la source et le nom de l’auteur·rice de l’œuvre citée, par exemple dans le générique de fin des programmes ou encore bandeau sous la citation.

Attention l’exception pédagogique, plus généreuse que l’exception de courte citation, n’est pas applicable ici, car le podcast une fois mis en ligne sera mis à la disposition d’un public plus large que les seul·es élèves, étudiant·es, enseignant·es ou chercheuse·rs.

### Les contenus dits libres de droits :

Certain·es créateur·rices décident de renoncer à tout ou partie de leurs droits en mettant leur création sous licence libre.

Il existe toute une série de licence libre avec des conditions d’utilisations variées, et il est essentiel d’y prêter attention et de les respecter. Il est en général demandé de citer l’autrice·eur mais les conditions peuvent aussi avoir trait au droit de modifier ou non l’œuvre, de l’exploiter commercialement, ou encore impliquer que toute œuvre utilisant ces contenus soit partagée sous le même régime de droit (auquel cas l’utilisation d’un contenu libre de droits peut vous obliger à diffuser votre podcast en refusant aux mêmes droits).

Dans tous les cas, il faut attentivement regarder les conditions de citation et de réutilisation même pour les contenus dits libres.

### La citation du point de vue des plateformes

Les plateformes sont normalement tenues de respecter les lois, mais pour de multiples raisons elles ont parfois une notion bien plus restrictive du droit à la citation.

YouTube par exemple, parce que c’est une entreprise américaine, parce qu’elles utilisent de nombreux algorithmes de détection de plagiat (qui ne font pas la différence entre plagiat et courte citation), et parce que pour ne pas fâcher les grandes entreprises de contenus YouTube leur a parfois délégué la gestion des cas litigieux en lien avec leurs contenus (et ô surprise, elles abusent beaucoup), ne respecte pas le droit à la citation.

Une vidéo citant un extrait protégé peut donc être censurée par YouTube (en coupant le son sur l’extrait concerné), mise hors ligne, ou démonétisée (c’est moins un problème pour Spectre).

De ce que j’ai pu trouver, il me semble que les plateformes audio sont pour l’instant moins sévères, mais il vaut mieux dans tous les cas limiter les citations au strict nécessaire.

### Pour aller plus loin

Comble de l’audace j’ai beaucoup copier-coller sans autorisation pour faire ce document (la paraphrase est compliquée en droit), du coup gardons-le en interne, et n’hésitez pas à aller voir les sites concernés.

https://iris.univ-tlse2.fr/moodle-ent/pluginfile.php/363764/mod_resource/content/3/guide_juridique_du_podcast.pdf

http://fr.jurispedia.org/index.php/Droit_de_citation_%28fr%29#La_citation_doit_.C3.AAtre_courte

https://www.archimag.com/bibliotheque-edition/2016/09/09/comprendre-droit-d-auteur-oeuvre

https://saooti.com/2020/04/15/blog-comment-gerer-les-droits-dauteur-pour-vos-podcasts/

https://mf-juridique.com/guide-juridique-podcast/

1 ou le ou la seul·e auteur·rice dans le cas d’œuvre collective (vous devez aussi avoir l’accord de vos co-autrice·eurs.